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Chronique de Concert

The Cure

Le Dôme - Marseille 4 mars 2008

Critique écrite le par

Et nous voilà bien emmerdés, M. Smith... Bon, il y avait ce mauvais buzz qui précédait cette tournée, dont il se disait dans les forums d'inconditionnels qu'elle démarrait boiteuse, avec des successions de playlists aléatoires, un light-show discutable et des choix d'arrangements souvent "audacieux".... Mais qu'à cela ne tienne, comment bouder son plaisir et refuser de céder à un des derniers et rare instant d'idolâtrie ? Idolâtrie, oui, forcément M. Smith, quand il s'agit de votre "Cure" il est certain qu'on ne peut plus cantonner la relation artiste/public aux termes de "fan", mais bel et bien basculer vers cet "investissement d'affect disproportionné dans une personnalité idolâtre permettant à certaines personnes en phase de construction de l'identité de stabiliser leur psyché au moyen d'un emprunt fantasmagorique à la psyché de l'idole."


Nous sommes donc près de 7.000 marseillais trop sages du cheveux là, dans le Dôme, à nous être probablement stabilisé la psyché lors de notre adolescence grâce à vous, M. Smith. Oh, bien sûr, quelques vrais adolescents sont toujours disséminés de ci - de là, mais la masse est définitivement constituée d'ex-badcave new-wavo-gothiques recyclés en cadres commerciaux, VRP, agents RATP, fonctionnaires de l'Etat, secrétaires, standardistes, jeunes pères et mères de famille qui s'émeuvent discrètement entre eux de cette "époque bénie" où se créper les cheveux faisait partie d'un quotidien maquillé, sombre, romantique et fataliste...


Je ne sais pas si ce n'est finalement pas plus déprimant de voir cet amas de quadragénaires ayant ressortis in extremis une paire de Doc Marteens d'un placard à souvenirs attendant sagement (et sans fumer) l'arrivée du dernier quatuor de M.SMith, que la foule vieillissante mais bonhomme, bruyante, bigarrée et enthousiaste qui attendait les papys de Deep Purple... Oui, les anciens corbeaux sont comme leurs aînés, les anciens soixante-huitards : recoiffés, chiants, lunetteux, donneurs de leçons, hypocrites, un peu honteux d'être là mais en même temps à la recherche d'une légitimité du type "moi, à l'époque, j'ai eu les cheveux crêpés comme ça, j'étais un vrai !" en tâtant avec une grimace leur début de calvitie. Oh, on croise bien quelques fantômes rescapés des 80's, (très peu pour tout dire), mais dans la grande majorité,on pourrait vraiment se croire à un concert de Vanessa Paradis finalement...


Le seul qui ait vraiment résisté au temps, oui, définitivement le seul qui n'ait pas retranché l'esprit des années new-wave au rang d'une mode vaguement ridicule et d'une musique vaguement mineure, c'est vous, M. Smith. Même votre dernier comparse rescapé des années flamboyantes de la gothic pop, M. Simon Gallup, a renoncé à porter une toile d'araignée sur le dessus du crâne (et Dieu sait que pourtant, il arborait la sienne, à l'époque, avec une classe folle et une exubérance jouissive)! Mais M. Smith est M. Smith, et c'est probablement pour ça qu'on est là n'est-ce pas ? Inoxydable, ses kilos en trop n'empêchant pas le maintien inébranlable d'une silhouette reconnaissable entre mille, qui malgré les affres du temps ne parvient pas à devenir ridicule là où n'importe quel humain normalement constitué, à vêture et look égal, ne pourrait sortir dans la rue sans se faire jeter des pierres...


Allez, trêve de jacasseries et venons-en au fait : les lumières s'éteignent, les quadras peuvent enfin libérer leurs dernières réserves dans le noir et se mettent à crier, retrouvant intacte l'exubérance de leurs 15 ans : M. Smith entre en scène.
Boudeur ou blasé ? Nonchalant ou démotivé ? Tout tient là, dans cette ambiguïté bizarre de l'idôle face à la foule : 7.000 contre un.
7.000 espérances face à une seule lassitude.
Allons-nous encore épiloguer sur le son du Dôme, dont on aura cependant tendance, cette fois, à attribuer une part de l'ignominie au groupe dont le choix de mixage, entre batterie rock garage au kick laidement tonitruant, basse insoutenable et inaudible et guitares touillées au dégueulis se focalise uniquement sur la voix de l'idôle ?... Allez, passons, pas de grande surprise de ce côté-là.
Maintenant, regardons ce groupe à qui l'on doit quelques unes des plus belles perles dark pop des 80's.


Qu'en reste-t-il ? Après un album inégal mais surprenant, piloté par un pape du neo-metal (M. Ross Robinson) qui a fait émerger quelques magnifiques pépites, voilà une formule à quatre sans claviers sur scène, un nouveau batteur étonnamment volubile, et ma foi, à priori de beaux signes avant-coureurs d'un come-back arty et puissant... Et ben non.
The Cure, en 2008, c'est une bouillie pop mal fagottée aux recettes éculées, des rythmiques usées jusqu'à la corde, des effets sonores redondants et cafouillants et un jeu entièrement axé sur des acquis en perdition : les mimiques de M. Smith vaguement forcées et sa marque vocale (intacte, il faut le reconnaître).
Bref, quand The Cure s'y essaye, c'est un exécrable groupe "rock-pop" : ce n'est d'ailleurs jamais sa capacité à aligner des riffs ou des rythmiques velues ou groovy qui l'ont porté au panthéon de la sphère anglo-pop, mais bel et bien une ingénieuse capacité à créer des atmosphères, à faire voyager l'imagination, et à inviter à une introspection perversement négative.


Le problème, c'est qu'une fois passée cette nouvelle et improbable propension à vouloir jouer d'interminables barouds "rock'n rollesques" (qu'est-ce que Porl Thompson tente de faire avec ses solos de guitare ridicules ?) poussifs, disharmonieux et inutiles, le retour aux valeurs sûres du groupe est tout aussi aléatoire... Le massacre de l'hymne "One Hundred Years" est terrible, la lourdeur noisy donnée à "Primary" est tout aussi ratée, et ce n'est pas ce "Shake Dog Shake" à peu près dans les clous qui sauvera de cette impression de mauvais virage : si l'on enlève au Cure la noirceur, la haine fratricide de l'humanité, la misanthropie, la plainte et le côté obsédant d'harmonies minimalistes soigneusement ciselées, il ne reste qu'un mauvais mélange de glam rock has-been.

Je laisse donc M. Smith à ses autres ex-fans qui n'oseront pas avouer leur déception et qui restent malgré tout tout en s'ennuyant quelque peu, à l'affût de tel ou tel titre (quoi de plus triste qu'un public qui attend d'un groupe un vieux hit en comptant les minutes entre deux morceaux dont il se fout ?) et je regagne calmement mes pénates.


Dans mon dos, un light show foutraque enchaîne des camaïeux de mauves, de roses et de bleus sur fonds de paillettes, et dans les escaliers, des jeunes filles de 15 ans tentent de danser le twist sur un énième gimmick rock raté.
Je suis content de ne pas avoir ressorti mes Doc Marteens; le revival new wave, faut aller le chercher ailleurs. Chez Depeche Mode par exemple, qui tout au contraire innove, surprend, séduit, mue et touche juste.
Ici, ce soir, nous n'avons que de vieux fantômes... I'm lost in a forest, all alone.

Plus de photos par Pirlouiiiit ici

Bonus vidéo :

> Réponse le 06 mars 2008, par Simon Pégurier

Que dire que je n'aie pas déjà écrit sur The Cure. En 7 concerts et autant de chroniques (NV # 14,54,94,98...) je pense avoir fait le tour de la question de ce groupe mythique qui m'a marqué au fer rouge à tout jamais et à qui je dois une partie de ce que je suis aujourd'hui. Bien sur je pourrais faire une chronique ironique comme j'aime les faire, me moquant gentiment de ce bonhomme qui grossit d'années en années mais ne renonce pas à son look choucroute sur la tête, je pourrais aussi ironiser sur le public qui vieillit abandonnant les pogos pour les gradins et qui n'a plus assez de cheveux (la faute à la calvitie) pour se coiffer en pétard. J'ai trop de respect pour Smith et les siens pour faire ce genre de papier. Je vous parlerai seulement du plaisir intense qui fut le mien durant ce...  La suite | Réagir

> Réponse le 06 mars 2008, par Mouth

Pas de blabla soyons constructif Premièrement la manifestation en soit : Importance de l'évènement The Cure à Marseille. Le groupe pour la première fois à un comportement de tournée style "Etats-Unis d'Europe" comme ils le font outre-atlantique, une à deux dates par pays pas plus. Donc là Marseille le Dôme. La salle : de merde comme tout les marseillais le savent (haaa l'époque où le groupe jouait au Palais des sports). Le public : comme on pouvait si attendre c'est un spectacle aujourd'hui familiale, les fans de la première heure s'étonnent des enfants en train de courir dans les allées, pourtant tout ça est parfaitement logique. Du fait des deux seules dates françaises on voit un public qui vient de tout le pays, on entend même parler espagnol et italien dans la file...  La suite | Réagir

> Réponse le 06 mars 2008, par Killootoo

[Le dome marseille - 4 mars 2008] N'étant pas un fan de la première heure des Cure, je ne peux pas avoir le recul de certains qui les ont peut être suivis depuis le début. N'empêche que ce fut à mon avis un excellent concert qui m'a donné envie de remonter dans le temps pour redécouvrir ce groupe. Peu importe le physique de ce bon Mr Smith, on s'en fout, il a super assuré à Marseille !  Réagir

> Réponse le 07 mars 2008, par Kriss

D'accord sur tout concernant cette "sale" ,avec en plus en ces temps d'obscurantisme :régime coca/ pop corn pour tous !!! on croit rêver!faut se réveiller ! Et bien sur no clopes , juste le droit de raquer ses 46/56 euros.........mais des volutes rebelles montaient de la fosse : rock's not dead. Le son bouillasse du début s'est amélioré au bout du 3eme morceau, y a vraiment des ingénieurs du son qui ont la foi et le talent.... Perso j'aurais préféré un concert concept genre Trilogy Berlin 03(02?) qui pour moi est le top .Mais comment ne pas craquer sur les oldies but goldies et la sincérité d'un groupe MATURE .C'est quoi ces "vieux /jeunes ,jeunes/ vieux que je lis ? On ne parle pas de Thomas DUTRONC que je sache mais de musiciens jamais compromis qui ont une Identité et LEUR style ,...  La suite | Réagir

> Réponse le 07 mars 2008, par Vand

Superbe critique, rien d'autre à dire, j'suis impressionné !  Réagir

> Réponse le 09 mars 2008, par .Ju.

Et voilà ! j'ai enfin vu ce groupe Mythique...et quelle première ! Moi qui ne suis pas un Curist de la première heure, excusez mon jeune age(26 ans), je me suis tout simplement et tout bonnement ré-ga-lé! Eternel retardataire oblige, j'arrive à 19h40. J'ai une excuse, avouez que 19H pour un concert c'est Chelou quand même! mais bon, je n'ai pas raté l'entrée de Robert et ses acolytes, là est l'essentiel - on est d'accord. Zappée la première partie, pas d'échauffement, et BING! me voilà direct dans vif du sujet...ZE Cure. Quelle claques ! quelle classe ! z'en connaissez vous beaucoup des groupes qui assurent trois heures de live pour 46 Euros? réponse : Non. On pouvait penser qu'ils allaient se faire un petit tour à Marseille tranquillou, un petit concert sympa avec un petit rappel...  La suite | Réagir

> Réponse le 11 mars 2008, par Sophie

j'adore les cure depuis que j'ai 15 ans, je les avaient vu en concert au Hall 6 du Parc Chanot en 87 je crois !! La voix de R. smith est la même un peu plus grave peut être mais toujours aussi belle. J'ai passé un formidable moment, presque trop court (bien que 3 heures de concert c'est presque du jamais vu). Oui la salle était rempli de quadra, souvent en costume (heure oblige) mais qui avaient tous retrouvé leur âme d'ado ! Quel groupe peut dire qu'il nous a autant fait voyager dans le temps !! Encore merci à ce groupe fantastique ....  Réagir

> Réponse le 07 août 2008, par rachel B

Bon fô croire qu'il les Z'aime pas le monsieur! moi ce que je ne comprends pas c'est son masochisme! Rester 3 heures à écouter un groupe qu'il passe 2 minutes à descendre pour le plaisir de.... Je crois qu'il n'a rien compris au film celui-là. Si on scrute le panorama de la pop vieillissante, on se rend vite compte que le temps fait des ravages. Mais par respect pour tous ces artistes qui donnent du plaisir aux gens qui continuent de les apprécier en dépit des choucroutes, des looks dépassés, des bedaines Kro, je pense qu'il faut tourner sa langue dans sa bouche et manier sa souris avec parcimonie. Si pour être encore dans le coup, il faut être mort en pleine gloire, pour que l'image ne soit pas entachée par les ravages du temps, il ne va pas rester grand monde qui trouvera...  La suite | Réagir

> Réponse le 16 octobre 2008, par Maaliciaa

Et moi qui m'en voulais d'avoir râté leur concert à Paris... Aurais-je échappé au pire. A la lecture de votre commentaire, je serai tentée de dire oui... alors allons-y : non rien de rien, non je ne regrette rien. Pourtant, le concert de Bercy an 96 ou 97 avait été génial : 3 heures de bonheur et un Robert qui a quitté la scène en pleurant, poussé par les autres membres du groupe. Devrais-je donc rester sur cette image et ne plus jamais tenter l'expérience The Cure in Live ? En attendant, je scrute le web pour guetter la confirmation ou non du concerte de Depeche Mode en juin 09 à Paris...   Réagir


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