Chronique de Concert
The normals, The intellectuals
Mais je m'en branle moi qu'ils tapent dans leur batterie, après tout une batterie c'est fait pour ça, pour qu'on la cogne (pas comme une femme, non une femme ça se besogne). Putain, merde, y en a assez de l'autodestruction narcissique. Il y avait tellement mieux, tellement plus rock'n'roll comme geste à inventer ce soir: le génocide de marionnettes.
Ils les narguaient pourtant les petits cons. Ils n'attendaient que ça les vilains petits bouts de chiffons. S'en prendre plein la balançoire. Toute cette armée d'infectes créatures qui pullulent sous le plafond de l'Excalibur. Je les déteste. Ils me dégoûtent ces pantins. Un peu comme les tableaux représentant des clowns, ça m'irrite le nerf optique. J'ai beau les ignorer. Je sens leur présence au-dessus de ma tête. Je me ronge les ongles, je commence à faire des mélanges, vin, bières, ricard. Ca ne va pas quoi.
Et comme beaucoup d'autres, avant et après moi, j'attendais que le rock'n'roll vienne me libérer.
Oublions. Laissons ces mochetés à leur triomphe d'un soir. Ce n'est que partie remise. Avec le contingent d'agités qui viennent dans ce bar, c'est bien le diable s'il ne s'en trouve pas un avec une vocation d'architecte d'intérieur.
Parlons musique. The Normals est un trio 100% masculin de Strasbourg. Nick, Seb et Cheb. Guitare, basse, batterie. J'ai d'abord pensé à Country Teasers, un groupe écossais, mort cette année, qui est lui-même inspiré par tout un courant de la musique américaine (disques parus chez Crypt, Fat Possum, In the red). Mais cette comparaison est plutôt réductrice. Elle vaut pour les morceaux les moins rapides sur lesquels le bassiste, Cheb Samir, joue des suites d'accords rebondis, comme s'il imitait la marche de l'ours, pendant que la guitare joue des parties trasho-plouc sorties d'un marécage de Bourbon.
Le style des Normals c'est du garage, du blues, du punk et même une pincée de new wave (je suis peut-être le seul à l'avoir entendu, oubliez). C'est aussi débraillé que les groupes de l'anglais Billy Childish et tout aussi énervé (ça c'est vrai n'oubliez pas). Ils s'énervent donc. On entend de l'harmonica à un moment. C'est Nic sans guitare avec une baguette. Il se plie en deux à deux doigts de s'écrouler par terre et cogne sur la batterie. Pas mal du tout. Mais pour Nick ça manquait de nerfs. Il le dit lui-même à ses collègues vers le dernier morceau. "C'était un peu mou, non ?" Les deux autres restent interdits.
Dans leur bagage, les Normals avaient amené une flopée de disques, témoins de la richesse de la scène garage en général et de la suractivité de ces Strasbourgeois en particulier. Je me suis fait expliqué leur catalogue par Seb, le batteur. Pas simple, de s'y retrouver. Il y avait un split album (chacun sa face) avec The Cheeraks, qui regroupe Nic et Seb soit les deux tiers des Normals. Un autre split 45 tours avec les Mascaras, un autre encore avec un certain Jeff Clark, ce LP avec des couleurs vives, le dernier album de Crash Normal, qui est The Normals plus deux autres musiciens, ce groupe existe depuis bien plus longtemps que The Normals, d'ailleurs en voilà un autre album, tout noir, là, c'est un autre 45 tours avec les Cheeraks, ce disque rose avec des poupées décapitées (gniark) une compilation d'un label américain où on retrouve plusieurs français dont Crash Normal, Dragibus, Le club des chats, The Normals, Cheb Samir and the black souls of leviathan, ce dernier étant le groupe du bassiste des Normals, attends là un 45 tours sans rapport direct avec les Normals, The Fingertips et Motorama, soit des tourangeaux et des italiennes, et ces deux vinyles sombres ?, euh, c'est Seb Normal, son projet électronique dans la veine de Squarepusher.
A côté de ces stakhanovistes, The Intellectuals auraient pu passer pour de parfaits dilettantes. Dans leur bagage, ce soir, ils n'avaient qu'un seul album et un seul 45 tours, une misère. Mais instruments branchés, les Italiens nous ont montré que leur musique était loin d'être une vue de l'esprit. Surtout pas une vue de l'esprit, leur nom n'est qu'un pied de nez (en tirant la langue). The Intellectuals c'est de la musique de petites brutes écervelées déguisées en rockers qui jouent pour faire du bruit et rigoler.
Un peu d'état civil, cependant, s'il vous plait. The Intellectuals, c'est d'abord un couple. Guitar boy et Drum girl, une version spaghetti des White Stripes. Sauf qu'en plus d'assurer comme une bête derrière ses fûts, Drum girl s'y entend aussi pour hurler derrière le micro et pousser quelques fous rires hystériques entre les morceaux. Un sacré phénomène. Le genre à se glisser dans votre dos vous taper derrière les genoux. Si, si. Elle me l'a fait, en fin de soirée, dans la rue. Puis elle a continué son chemin tout en laissant un ricanement de gamine derrière elle.
Le troisième membre, c'est Key Tee, aux claviers. Ce soir, elle avait d'immenses lunettes, histoire de faire relever la tête aux mâles parce que c'est vrai qu'avec sa paire de seins (pauvre dos), ce n'était pas gagné. Sur sa main droite, il y avait écrit Ozzy. Les autres avaient aussi des machins écrits, mais je n'ai pas réussi à lire quoi.
Key Tee ne jouait pas sur tous les morceaux. Comme vous l'avez lu plus haut, elle est récente dans le groupe. La plupart des morceaux ont été écrits à deux, pour seulement deux instruments. Et quand elle intervient, cela reste discret, ce n'est pas Money Mark ou Charly Oleg, son style est beaucoup plus minimaliste, du genre une note après l'autre. Tout pour le rythme.
La soirée aurait pu se terminer sur un dernier morceau incandescent des Intellectuals et une chute sur le dos de Guitar Boy. Mais certains, portant une crête et un tee-shirt Dead Kennedys, avaient décidé de rappeler les Normals à leur devoir. Il y avait encore un peu de temps avant le couvre-feu. Alors en insistant un peu, Nic consentit à reprendre sa guitare, suivi par ses deux comparses, ainsi que par Guitar boy au clavier et Drum girl et Key Tee aux churs pour deux reprises et un final du tonnerre des Normintellectuals. J'ai identifié la première Pushin too hard des Seeds (1966), pas la seconde. Peu importe. C'était juste un excellent moment d'explosion rock et de fraternité musicale.
Et puis, il y avait ce pèlerin en casquette, d'aucuns l'appelerait Rollmops (hareng au vin blanc). Je l'avais déjà remarqué lors d'un autre concert. Quand il est content du spectacle Rollmops ressent l'impérieuse nécessité de toucher les artistes. Ce n'est pas simple geste de fan pris d'alcool, il semble y avoir une forte dimension chamanique à ces attouchements. Je connais ainsi un cameraman qui avant un direct touche tous les gens autour de lui afin d'échanger toutes les bonnes énergies et il scande ce faisant, "un peu de mon talent, un peu de ton talent". Je vous jure. Il y a de vrais esprits à France 3 Lorraine Champagne Ardenne. Rollmops doit appartenir à la même secte. La chanson officielle de cette secte, c'est I can't explain des Who, très bon hymne pour une secte (excellent devant le juge). Rollmops a essayé de la placer, sans succès, mais cela ne l'a pas découragé de s'approcher subrepticement d'un micro pour gueuler comme les autres.
Et pendant ce temps, sur sa balançoire, le clown se marrait. Petit salop.
L'espace de The Normals: ici
L'espace de The intellectuals: là
Pour d'autres concerts de ce genre sur Reims: c'est par là
Critique écrite le 01 novembre 2006 par Bertrand Lasseguette
Excalibur, Reims : les dernières chroniques concerts
The Bewitched Hands on the Top of our heads, Libelul par Bertrand Lasseguette
Excalibur, Reims, le 14/06/2007
Ah, ah, ah. Le Brian Jonestown Massacre peut aller se rhabiller. On a mieux, nous, ici à Reims, The Bewitched hands on the top of our heads. ON THE TOP OF OUR HEADS, c'est un peu dur de s'en souvenir et pour le prononcer correctement, à la coule, il faut s'accrocher. Je ne crois pas trop me tromper en disant qu'il s'agit d'un hommage aux... La suite
Sheriff Perkins, Lover ! par Bertrand Lasseguette
Excalibur, Reims, le 17/10/2007
Elle s'appelle Daphne. Elle joue de la basse. Elle en a troublé plus d'un. Elle m'a fait penser à Michelle Mae, de Make Up, Scene Creamers et actuellement dans Weird War. Le même nez légèrement en trompette, la même moue, le même instrument.
Daphne joue dans Lover !, une formation américaine. Lover ! joue du punk bubblegum, un... La suite
Block Out, Vortex of end, Tchikentai et Biribirum par Bertrand Lasseguette
Excalibur, Reims, le 17/02/2007
Beurk. Pas beau. Caca. Voilà, pour résumer, tout ce que m'inspire en général la musique métal. L'écoute successive de ces trois groupes fut pour moi, une longue descente aux enfers. Dignes porte-étendards de leur mouvance esthétique, Block Out, Vortex of end et Tchikentai et Biribirum, nous ont offert tout ce qu'il y a de plus abject dans cette... La suite
Illegal Process, Aido Music System, Brazilian Fever par Bertrand Lasseguette
Excalibur, Reims, le 05/02/2007
Brazilian Fever, c'est en fait 12225 Chacals sans Pims leur bassiste, soit les deux frères Payart.
Aido, déjà vu, déjà entendu. C'était comme une répétition avant leur soirée historique du 7 février (trois spectacles enchainés et déchainés mélangeant rock et théâtre).
Illegal Process, une découverte pour moi,très intéressant, du power rock... La suite