Accueil Chronique de concert The Willowz + The Dynamites + The Standells
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Chronique de Concert

The Willowz + The Dynamites + The Standells

The Willowz + The Dynamites + The Standells en concert

Eysines goes Rock& Soul Day2 13 Juin 2010

Critique écrite le par

Eysines, Day 2.

Comme nous n'aimons pas la routine, c'est bien sûr en retard que nous arrivons aujourd'hui, mais cette fois nous ne raterons pas la fin... Pour notre défense, je dois dire deux choses : l'arrivée des flics la veille pour précipiter la fin des réjouissances (hé oui, je me renseigne) a fait commencer tout notre petit monde vachement tôt aujourd'hui, et le formidable temps en cette mi-juin avec ses allures de fin du monde jusqu'en milieu d'après-midi, m'a incité à prendre mon temps.



Coût de l'opération, nous n'arrivons que pour les Willowz , in medias res. Bonne pioche : les quatre californiens, autant à l'aise dans la composition de BO de films ( Eternel Sunshine of the Spotless Mind , La science des rêves ) que sur scène, envoient du gros rock énergique qui sent bon les 70's -la voix + le côté un peu prog des chansons à rallonge- et le grunge -les tripes, les grattes, les cheveux longs du chanteur (...). Du Black Crowes en moins cliché et plus jouissif. Deux guitares puissantes et torturées plus un tom basse qui se rajoute, le rythme très soutenu détone avec la pelouse presque vide et le soleil dominical.



D'ailleurs, comme dirait le chanteur : "You can't play rock'n roll on daytime, it never works" ; les conditions ne s'y prêtent pas, mais peu importe, l'opération à cœur ouvert est contagieuse, entre deux lâchers d'avion (Mérignac n'est pas loin), ce qui aura valu une bonne joke à l'américaine ("Look at that plane, it's towering !" ...) sur une distorsion infinie de pédales.
Ça marche tellement que ces messieurs-dame sont priés de revenir en piste après un rappel chaleureux. Reprenant du Led Zeppelin (pas compris laquelle) et finissant en beauté, tourbillon saturé, atmosphérique.



Un verre sans fond plus tard, le big (backing) band des Dynamites entre en scène, auréolant en demi-cercle Charlie Walker , le fameux chef de cérémonie tout en élégance, qui à lui seul fait danser tout le public (même les vendeurs de churros). Les Dynamites , autoproclamés ainsi peut-être en hommage à James Brown , surnommé Mr Dynamite, ne portent pas fabuleusement bien leur nom ; ils ont quelque chose de guindé, de peut-être trop blanc ou trop "conservatoire de musique" pour jouer le jazz-funk de leur répertoire. Ou par ce principe sempiternel du backing band, tapi dans l'ombre de Mister Charlie "from Nashville, Tennessee", au même titre que la convention de l'intro instrumentale, de l'interlude, du "Ladies & Gentlemen, let me introduce you..." et tout ce cérémonial un peu classique.



Mention spéciale tout de même pour l'homme-clavier, sorte de Gainsbourg à l'américaine, débraillé mais débordant d'une classe désinvolte, fumant clope sur clope, sous l'emprise d'une sorte de fièvre quand il joue, et qui aura l'air de nous improviser un poème, en français dans le texte, en hommage à une française. Rien de mieux pour séduire notre public. À ce moment-là, forcément, le ciel se fond en un sympathique coucher de soleil, et mis à part les avions qui bouchonnent dans le ciel, on se prend au jeu de l'enthousiasme. Puis le clavier retourne à son clavier, le mégot au bec, et les musiciens + Charlie reprennent de plus belle. En un peu longuet même, malgré la jolie prouesse du "train en marche", une grosse set-list sans pause, qui s'enchaîne sans perte de rythme. Eux aussi ont droit au traditionnel rappel qu'ils honorent sans sourciller, comme ils l'avaient sans doute prévu.



Je constate entre deux changements de plateaux que la musique d'attente n'a pas été renouvelée, et on retrouve le même Hush en version instrumentale, le Light my fire version féminine i tutti quanti, un peu molasson tout de même.

L'heure de la tête d'affiche, et la pression se fait sentir, d'autant qu'après la piètre prestation des Zombies hier, on est en droit de stresser. Un autre mastodonte des sixties nous fait donc son revival ce soir, un groupe qui a contribué à inspirer la nouvelle vague garage avec ses mélodies pop à grand renfort de clavier ; here they are: The Standells from Los Angeles. Les voilà qui s'installent, quatre vieux messieurs, mais déjà le batteur que l'on voit d'un œil inquiet s'installer derrière une montagne de toms nous fait d'ores et déjà comprendre qu'il ne faut pas s'attendre à écouter de la pop ce soir, avec en prime l'attitude correspondante à son attirail, celui du drummer hero qui ne perd pas une occasion de faire chauffer ses roulements.



Le début du set est une bonne surprise, le son est énergique, les Standells s'animent, enthousiastes, et mis à part quelques envolées de guitar hero (décidément), ça sonne bien et le public approuve. Bon, clairement nous ne sommes plus dans le registre de la pop, mais il y a toujours le son aiguisé de la telecaster, les notes entraînantes du clavier et la basse mélodieuse. En pleine euphorie, ils entament leur tube Sometimes good guys don't wear white , après quoi Larry Tamblyn, toujours au clavier, introduit une chanson "too dirty to pass on the radio", et ça fait du bien d'entendre des anecdotes sans fioritures au lieu d'un concentré de branlettes égocentriques. Et pourtant, à mesure que le show se poursuit, on se rend compte que quelque chose déraille ; le clavier que, nous, public, entendons peu, le guitariste et le bassiste eux, ne l'entendent presque pas ; moment de flottement et solo désagréable de batterie pendant qu'un conciliabule avec l'ingé-son se créé. Un peu plus tard, le bassiste tente de s'accompagner à l'harmonica, mais il s'aperçoit que ses mains tremblent trop alors au bout de trois notes, il repose douloureusement l'instrument. Les morceaux s'élastiquent et se perdent de vue, les solos inutiles se multiplient. Chacun semble déconnecté, dans une bulle, même s'ils manifestent à grand renfort de sourires et de remerciements leur plaisir de jouer. Ils tentent un retour de flamme avec leur deuxième hit Dirty Water , mais l'engouement s'est bel et bien essoufflé.



Le public, au début réactif et enthousiaste, ressent ce décalage, et sombre dans une sorte d'amertume léthargique ; la foule se disperse, les cris entre chaque chanson se font plus étouffés. Au loin, les grenouilles coassent, c'est la saison des amours. L'ambiance s'étiole, tant et si bien que le groupe s'enfuit timidement au bout de 40 minutes à peine, revient histoire de au terme d'un maigre rappel, bazarde une dernière chanson et quitte la scène sans demander son reste. Déjà, les spectateurs filent en petits groupes vers le parking, et nous, un peu gênés et attristés par la scène, déguerpissons de même.



Les Standells sont terriblement touchants, donnant le meilleur d'eux-mêmes pour leur public. Sauf que le meilleur d'eux-mêmes semble avoir pris une ride, et le public ici, n'avait que trois rangées, des visages attentifs et exigeants engoncés dans des imperméables. Les sixties ont un arrière-goût de fané, définitivement. On ne devrait pas s'attendre à ré-entendre quarante ans plus tard le même groupe mythifié cristallisé dans le même son, les mêmes techniques, voire les mêmes attitudes. Eux comme les autres ont vieilli, essayant de faire évoluer leur son, jonglant avec les aléas de leur existence individuelle et collective, et l'équation de tout ça créé forcément un décalage, rarement réussi.


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