Chronique de Concert
Trio Barolo: R. Poulakis - F. Castellani - P. Euvrard
Si l'origine du groupe est Française avec Philippe Euvrard, celui-ci a tôt fait de passer le Piemont, et par la magie d'un nom de vin : le Barolo, de nous faire entendre le souffle de L'Italie rendu par Francesco Castellani, puis celui de la Grèce, avec Rémy Poulakis.
Rémy Poulakis : Accordéon, voix / Francesco Castellani : Trombone / Philippe Euvrard : contrebasse
La mouvance et le métissage sont lancés, ils ne s'arrêtent pas là. Est-ce la douceur de l'alizé que souffle par moments Francesco Castellani dans l'embouchure de son trombone, sans émettre de notes ? Est-ce par la simple grâce des rythmes et des mélodies que nous écoutons ? Les auditeurs sont transportés, le voyage continue, sans ordre défini : bossas et tango d'Amérique du sud, Algérie, retour en Italie... On aura vite fait de qualifier les mélodies du Trio Barolo du label " Musique du Monde ", c'est juste, mais c'est aussi bien plus. Une musique de Road Movie, des mélodies qui invitent à l'errance, simples, gracieuses, aérées, et qui ouvrent d'amples espaces. Je ne connais que Renaud Garcia-Fons qui produise une musique semblable à celle-ci, et tout aussi belle, riche en mélodies. Eric Longsworth aussi, que j'ai vu au Festival de la Tour d'Aigues l'été dernier. Détail amusant : j'apprends en pianotant sur le web qu'il est un ancien membre du Trio Barolo.
Deux instruments à vent, qui n'ont pas grand chose en commun, un autre à cordes. La formule est originale, inédite à ma connaissance. Elle fonctionne à merveille. Quelle est le secret de cette alchimie qui opère un tel charme ? Une austérité apparente, un versant acoustique pur, optimisé par la chaleur des timbres que nous écoutons, et peut-être aussi un vocabulaire, un langage dont nous ignorons la grammaire, mais auquel nous sommes naturellement sensibles, un esperanto musical. Les morceaux sont tous magnifiques.
Philippe Euvrard accompagne, parfois il pince les cordes, parfois à l'archet, façon ostinato ou ligne de basse, puis il prend occasionnellement la mélodie. Son jeu est sobre et riche à la fois, il met en valeur le superbe potentiel sonore de la contrebasse.
Rémy Poulakis double souvent de sa voix les cascades de notes qu'il extrait de son accordéon. Le chant prend parfois la tangente, se libère et donne libre cours à sa voix puissante et claire de gondolier Vénitien, ou de Ténor a la Scala, ou de bopper qui swingue : libre à chacun de projeter ses images.
A propos d'image, je suis sensible actuellement à l'aspect visuel du concert, et comme samedi dernier au Roll'Studio, le groupe apparaît comme un tableau vivant, peint par un maître quelconque, des Flandres ou d'Italie. Eclairés d'une lumière chaude, les musiciens effectuent leurs gestuelles recommencées : l'un applaudit au ralenti, sans jamais que ses mains ne se rejoignent, l'autre d'avant en arrière, ramène sa coulisse avec souplesse et le troisième, c'est de haut en bas qu'il caresse ses cordes. C'est aussi beau à voir qu'à entendre.
Mais ma préférence va à la coulisse : je suis particulièrement sensible à la chaleur du trombone de Francesco Castellani. Ses distorsions ont la pureté d'un chant, d'un 'lament' Ellingtonien, pas forcément triste ou plaintif, à l'instar de celui de Rémy Poulakis. Le son du trombone est prenant, il vient de loin et nous porte encore plus loin. La musique est très illustrative, mais de manière surprenante n'énonce ni n'impose aucune image pré-établie. Chacun est libre, encore une fois, d'y apposer ce qu'il voudra. Il suffit de fermer les yeux et d'écouter l'invitation au voyage.
Cet effet culmine lorsque Rémy Poulakis rejoint au chant Francesco Castellani qui lui aussi donne sur un morceau de la voix. Est-ce le chant de pêcheurs traditionnels qui étendent ensemble les filets sur la plage, au crépuscule, quelque part au Sénégal ou au large de l'Inde ? Est-ce celui des bergers Piémontais qui célèbrent de concert la fin de l'été et le retour des alpages ? Nul besoin de conférence ni d'images. Ce chant-là chant vient du cur, il énonce quelque chose, d'ancestral, de permanent, d'universel chez l'homme. Quelque chose de beau, et qui n'a pas de nom.
La musique qui émerge du Trio Barolo, devenu Quintet par l'apport de deux voix pures est écrite, énoncée depuis l'alphabet dont on fait les rêves.
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Critique écrite le 11 mai 2012 par Mardal
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