Hier, Pirlouiiiit fêtait ses 21 ans ; non pas le nain chevaleresque de Peyo, mais le photographe mélomane de Marseille. D'ailleurs, celui-ci possède quatre 'i', rendant d'autant plus inédits, intrépides, irrésistibles et inoubliables ses intermèdes nocturnes. 21 ans, soit une majorité américaine à sillonner les clubs, salles de concerts et autres bars de nuits, pour certains toujours ouverts ... la Maison Hantée ou l'Intermédiaire, pour certains rebaptisés ... l'ex Balthazar ou l'ex Poste à Galène ; d'autres encore, enterrés et mythifiés ... comment ne pas penser à la Machine à Coudre, qui s'est éteinte brutalement, entourée de décombres.


21 ans à documenter du larsen comme d'autres traquent les scoops ou chassent les faits d'hiver, et autant d'années à capturer les envolées lyriques ou gutturales, les pulsations, les communions, entouré d'une foule au bord du pogo ou de silhouettes les yeux clos au beau milieu d'un silence vertigineux. En plein coeur, dans le ventre même de ces lieux où se tissent des moments uniques, jubilatoires, extatiques, des piétinements, des brouillards de fin de soirée ; juste avant le point du jour, entre la bière tiède et la cendre froide, se perçoivent encore l'écho, la rumeur, le grain de ces coups de foudre éclectiques.


Autant d'années à les immortaliser par la photo et souvent par le mot ; à les exposer, les mettre en valeur, à précieusement les archiver, quand il ne participe pas aux synergies collectives, Live in Marseille ou Phocea Rocks à saupoudrer de musique la routine de l'entre-concert ou à lui faire prendre la lumière d'un soleil indien rue Consolat. On le retrouve aussi, à peupler les rangs d'un magazine balbutiant - On the Rocks - aux soirées de soutien pour un disquaire qui pousse ses bacs de disques chaque vendredi soir, pour un agenda mensuel aux (deux) cents dates underground, ou contre une guerre.

Précieuse scène ; précieux sont ses contributeurs. Engagez-vous, qu'ils disaient (...)

Du haut de son jeune âge, Pirlouiiiit a pourtant une famille qu'on a vue grandir, casque sur les oreilles, puis debout sur une scène ou carnet de chroniques à la main. La relève, qu'il disait.


Hier, dans l'un de ces clubs que la ville a su rendre éternels, se produisaient trois groupes chers à Pirlouiiiit. D'abord, Usken, ce trip-hop élégant porté par une voix batifolant entre Bjork et Beth Gibbons qui souligne avec une puissance cristalline l'arrangement subtil de guitares vibratoires, de paysages sonores tranchants. S'en suivit la tourbe ciselée made in De la Crau, un concentré d'occitanie chamanique guidé par la voix cendrée de Sam Karpenia. Et quelle belle conclusion que 25, noise punk des entrailles, de l'ombre viscérale, calquant la nuit sans étoiles recouvrant Marseille de son encre portuaire. Mais je m'arrête là ... cette soirée, je n'y étais pas ; je l'ai imaginée depuis le tréfonds fébrile de ce virus qui me tient à la gorge depuis ces jours venus en nombre. Je laisse le soin à une Gina, à un Philippe, à un Vinz ou à une autre brillante plume de conter l'instant. De chez moi pourtant, à 17 kilomètres de l'Intermédiaire, je sentais les pulsations ramenées par la mer. Ou était-ce la fièvre qui battait dans le creux de mes tempes ? Qu'importe, une déferlante était venue me cueillir à la faveur d'un assoupissement et m'avait rendue à vous, T-shirt Vortex entre scène et comptoir, trinquant du gomé avec Stephan, souriant aux autres du regard avant de sentir des ondes moins maritimes me parcourir le corps. Encore la fièvre, sûrement. Une autre fièvre pourtant.


La contagion se propage jusqu'à Pirlouiiiit qui aujourd'hui schizophrénise François, changeant même de lieu et d'ambiance musicale, mais prolongeant la fête. En voici un qui a tout compris...

Cheers amigo et longue vie à Pirlouiiiit !