Chronique de Concert
Vox Low
Chris Imler
Mais n'allons pas trop vite en besogne. Comme me le rappelle régulièrement une bonne connaissance, les préliminaires c'est important. Et en guise de préliminaires ce soir on a droit à l'inénarrable Chris Imler. Survêtement et chemise lie de vin, quelques fausses excuses pour chanter en allemand et en anglais, voilà le personnage. Debout derrière fûts et machines (il ne jouera qu'une note de trompette !), sous des airs de candide étonné d'être là, Chris Imler déroule un set précis. Les boucles sont de plus en plus dures, quasi hard tech par moments. La température monte d'un cran. Il y a du Kraftwerk dans tout ça, et pas uniquement parce que ça chante en allemand... Une forme de transe et d'hypnose qui est une parfaite introduction à ce que va proposer Vox Low. Bref, une première partie raccord, 45 minutes qu'on ne voit pas passer, bien vu.
Vox Low
Changement de plateau rapide et fondu au noir. La scène est plongée dans la pénombre, seulement balayée par des LEDs blanches agressives, comme les projecteurs d'un mirador surveillant la cour d'une prison. En fond sonore un bourdonnement oppressant. Il s'est peut- être écoulé 1mn quand les quatre membres du groupe s'installent. Je suis pour l'instant face à la scène. A ma droite, aux claviers, guitare et chœurs Jérôme remplace désormais Guillaume. Au centre, Jean-Christophe, chanteur et maitre des (strange) machines. A sa gauche, Benoît à la basse (et en marinière, bien vu). Mathieu à la batterie ferme le rang en fond de scène. L'installation est immuable, un peu comme "Rejuvenation" qui vient ouvrir le set, poisseux et qui s'étire en guise d'introduction à la plongée dans les ténèbres qui nous attend. Parce qu'on a beau oublier qu'on patauge dans la Seine, on est ici dans "20 000 lieux sous les mers", ses animaux étranges et inquiétants, pas dans "Flipper le dauphin".
D'ailleurs les morceaux s'enchaînent sans temps mort malgré d'étranges appels au dénudement du batteur. Quelques "Pam Pam Pam" sur les chœurs de "Strange Machine" sont également étonnants. Ce n'est pas vraiment un hymne de stade... Mais le public est joueur ce soir, et en terrain connu. Vox Low joue à domicile. Il suffit pour s'en convaincre d'entendre la clameur qui monte aux 1eres notes de "Now We're Ready To Spend". Le groupe déroule ses morceaux, imparables. Mais hélas pas "The Reasoning Place" ni "Stay Away Mantra" que l'on retrouve sur le 45T. Étrange.... JC me confiera qu'ils sont encore trop lents pour le live. Darks à souhait, toujours plus même. Et lents certes, mais ils auraient à mon sens toute leur place en début de set, pas moins légitimes que "Rejuvenation", ou même au milieu, quand il s'agit de redescendre avant le prochain décollage, façon Grand Huit. Ce "Stay Away Mantra", qui n'est pas sans évoquer New Order ou le Joy Division circa "Atmosphère". La référence est réductrice. Mais elle permet d'évoquer ce que l'on s'autorise à penser dans les milieux autorisés : pourquoi Vox Low ne colle pas de reprises dans son set ? Il s'en trouverait un peu rallongé et on ne pourrait plus se plaindre de ce goût amer de j'en veux encore.
Que dire de plus que ce que j'ai déjà écrit ? L'alchimie d'une section rythmique rock impeccable avec les mantras électro et les riffs de guitare comme des coups de griffe fait merveille, une fois encore. Même aux portes de l'enfer, six pieds sous mer on continue à danser. Je n'assiste sans doute pas au concert le plus habité mais plutôt à la joie de reprendre la route et le rythme. Les références sont peut-être à rechercher du côté de Can ce soir. Répétitif, entêtant, hypnotique. La salle répond en conséquence. Les yeux fermés, les corps qui ne répondent plus, voilà l'effet que tout cela produit. Jusqu'à l'apothéose, un dernier morceau qui s'étire à n'en plus finir, en écho à l'introduction du set il y a à peine plus d'une petite heure. Un work in progress de l'aveu du groupe, intitulé pour l'heure "You Know, it grow" et qui devrait se retrouver sur le prochain album.
Si je peux me permettre, il n'y a pas grand-chose à y ajouter ! Un dernier shoot et l'adrénaline qui monte en flèche. Des riffs de basse rageurs qui viennent jouer dans les aigus auxquels répondent les stridences d'une guitare qui déchire. La batterie est monstrueuse, une machine. Voix et machines (les vraies) viennent habiller le tout. Bienvenue dans la matrice. Parfait. On sort de là un peu hébété. Mais comme toute drogue l'addiction, insidieuse, n'est jamais loin. A quand le prochain fix ? Une tournée anglaise se profile, une claque à venir dans la gueule de la perfide Albion. Putain, c'est loin l'Angleterre...
Critique écrite le 23 mars 2022 par Lb Photographie
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