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Chronique de concert Interview avec Estelle
Lundi 23 décembre 2024 : 6830 concerts, 27255 chroniques de concert, 5420 critiques d'album.
Interview avec Estelle
C'est une première sur Concert & Co, un peu comme si on perdait notre virginité et qu'on entrait dans la cour des grands : voici notre tout premier Grammy Award ! Cette récompense, souvent considérée comme la plus haute distinction de l'industrie musicale, la chanteuse britannique Estelle l'a remportée en 2009 pour son tube planétaire American Boy. Quatre ans ont passé depuis la sortie de l'album "Shine", sur lequel figurait le titre, et l'artiste revient avec son troisième opus, intitulé "All Of Me". L'occasion pour elle de revenir en France donner un concert unique à La Maroquinerie (voir la chronique de ce concert en bonus à la fin de l'interview) et de nous accorder quelques minutes de son précieux temps. Rencontre avec une star, une vraie...
Tu es devenue mondialement célèbre grâce au tube American Boy... première question : est-ce que tu n'es pas fatiguée de le jouer ?
Absolument pas, au contraire, j'adore le jouer ! C'est le genre de titres dont tout artiste rêverait pour lancer une carrière internationale. Et puis le public m'aide bien en le chantant avec moi.
Après l'énorme succès de cette chanson, est-ce que tu as eu peur de n'être plus que "la chanteuse d'American Boy" ?
Non, quatre ans avant ce morceau, j'avais sorti 1980, qui avait déjà eu un gros succès. Je ne me pose pas trop ce genre de questions, je fais ce dont j'ai envie et je continue d'avancer. Si je devais être inquiète de quelque chose, ce serait plutôt de ne plus pouvoir chanter un jour... Tant que tu continues à faire de la bonne musique, les gens ont envie de l'acheter et de l'écouter. Moi, je veux juste continuer à faire de la musique que les gens ont envie d'écouter.
Tu n'as ressenti aucune pression ?
Non, je pense que si tu te mets la pression, si tu te dis "oh mon dieu, je dois faire un autre American Boy", tu te sabordes toi-même. Ca fait quatre ans que la chanson est sortie et les gens continuent de la chanter comme si c'était hier.
C'est vrai que tu as laissé passer quatre ans entre chacun de tes albums, ça aussi, ça peut mettre une certaine pression, parce que les gens espèrent un résultat à la hauteur de l'attente...
J'écris des chansons sur ce que je pense et ce que je ressens, donc j'ai besoin de vivre des choses pour écrire dessus et, forcément, ça prend du temps. Mais maintenant que j'ai fait trois albums, j'écris beaucoup plus vite qu'avant. Et puis je pense aussi avoir franchi un cap en tant que femme, donc le prochain ne sortira pas dans quatre ans. En fait, j'aimerais en sortir un par an, ça me paraît être un bon rythme. Donc à la fin de cette année ou l'année prochaine, vous devriez avoir le quatrième !
Tes fans vont être surpris...
Oui, mais j'espère surtout qu'ils seront contents !
On parlait d'American Boy... c'était un duo avec un ami à toi, Kanye West, qui a sorti cette année l'album "Watch The Throne" avec Jay-Z, et maintenant ils font une tournée ensemble : est-ce qu'il y a un artiste avec qui tu pourrais faire ce genre de collaboration ?
Je dirais Swizz Beatz... Je pourrais vraiment faire un album entier et partir sur la route avec lui. Ce serait génial !
Puisqu'on parle de collaboration, tu as travaillé avec énormément d'artistes : John Legend, Kanye West, Janelle Monae, Rick Ross, Chris Brown, David Guetta... avec qui aimerais-tu collaborer dans les années à venir ?
Mary J. Blige.
Ce serait énorme !
Oui, ce serait vraiment incroyable !
Un autre peut-être ?
C'est difficile. Surtout quand tu as travaillé avec des gens du calibre de John Legend ou Kanye West, ça devient compliqué de trouver des artistes avec qui collaborer. J'aimerais bien faire quelque chose avec des artistes country, comme Carrie Underwood, que j'adore.
Est-ce que tu peux nous raconter ta rencontre avec David Guetta ?
Je l'adore ! C'est lui qui a demandé à travailler avec moi et on s'est finalement retrouvé en studio à Miami en 2009. Je voulais vraiment rencontrer ce type dont j'avais tellement entendu parler et puis voilà, ça s'est fait assez simplement. Depuis, on s'apprécie vraiment beaucoup ; lui et sa femme sont des gens extraordinaires. Ils font de la musique, ils ne sont pas là pour l'argent, et j'aime cette approche des choses. Et puis il est tellement gentil... je veux dire, en tant que personne, il est vraiment adorable.
Quand je pense à des artistes comme Roots Manuva, Dizze Rascal, Plan B, Professor Green, The Streets et plus récemment Rizzle Kicks, j'ai le sentiment qu'il y a quelque chose de très spécifique dans le RnB et le hip hop britannique, qu'est-ce que tu en penses ?
C'est vrai, et ça prouve qu'on continue d'aller de l'avant et de faire avancer la musique britannique dans le monde. Je viens de l'époque de Roots Manuva et je trouve ça génial d'être encore là à celle de Rizzle Kicks. Pour moi, c'est vraiment ça le plus important, ça me rend juste heureuse et fière et j'en remercie Dieu chaque jour.
Tu penses qu'il y a une façon britannique de faire du RnB et du hip hop, une sorte de "son anglais" ?
Eh bien oui, ce son vient de tout un tas d'influences qui nous rendent uniques, de toute l'histoire musicale de notre pays.
Tu parles souvent du temps que ça t'a pris et de tout le travail que tu as du accomplir pour arriver là où tu en es aujourd'hui, est-ce que tu dirais que tu es un exemple pour les jeunes ?
Ca, c'est aux gens de le dire, mais je continue de travailler tous les jours et je crois que oui, en ce sens, mon parcours est plutôt un exemple à suivre. Il y a plusieurs filles à Londres qui me disent qu'elles venaient à mes séances de dédicaces il y a quelques années et que maintenant, elles ont fait leur chemin, elles ont monté leur propre label, elles se sont servies de ce que j'ai fait et elles cartonnent. Mais je ne veux pas être plus qu'une forme d'inspiration. Et encore une fois, je suis juste heureuse d'être là ; je ne pouvais pas prévoir comment se déroulerait ma vie, je suis très reconnaissante.
Je suppose que ça aide aussi à garder les pieds sur terre...
Oh oui !
Tu as déménagé aux Etats-Unis il y a cinq ans, est-ce que tu penses qu'un artiste doit aller en Amérique pour réussir ?
Non, mais pour moi, c'était vital ! C'est une partie importante de mon histoire, mais ce n'est pas un passage obligé pour tout le monde : quand je vois ce que fait Tinie Tempah par exemple... je trouve ça super.
Tu voyages énormément, est-ce que les endroits où tu vas ont une influence sur ta musique ?
Oui, je regarde les chaînes musicales de tous les pays où je passe ! Je suis curieuse de voir à quoi ressemble la scène locale, alors je regarde les clips... après tout, c'est comme ça que j'ai eu envie de faire de la musique. C'est toujours bien de découvrir des choses nouvelles, de nouveaux sons, de nouvelles énergies. Tout ça se retrouve sur mes albums.
Puisque nous sommes sur Concert & Co, on va parler un peu de live. Est-ce que tu te décrirais plus comme une artiste de studio ou une artiste de scène ?
La scène, sans hésiter ! Quand j'ai commencé, le passage en studio était pour moi un moyen d'arriver à la scène : en gros, je devais enregistrer ce que j'allais jouer. Aujourd'hui, je me sens mieux en studio, je m'y sens plus libre d'écrire ce que je veux et j'apprécie d'y passer du temps.
Comment est-ce que tu abordes la transposition de ta musique sur scène ?
J'essaye de la changer autant que je peux ! Je suis vraiment le genre de filles qui rend ses musiciens fous, parce que tous les jours, il y a des choses que je veux modifier. Ils me détestent autant qu'ils m'adorent pour ça : le résultat est génial, mais ça leur donne beaucoup de travail. On fait tous les soirs un concert différent ; je crois que sinon je m'ennuierais.
Donc on peut aller voir chaque concert de ta tournée...
...et tu ne verras jamais deux fois le même !
Si tu devais nous donner ta recette d'un bon concert, en quelques mots ?
Je crois qu'il faut que tu croies à ce que tu fais et que tu t'amuses. J'aborde tous les publics comme s'ils ne connaissaient pas mes chansons et que je devais les conquérir, les convaincre. Même si j'ai beaucoup de fans, je fais chaque concert comme s'ils ne me connaissaient pas. C'est comme ça que j'arrive à mettre autant d'énergie dans mes performances scéniques. Tu ne peux pas connaître les paroles et chanter en chur avant d'avoir acheté l'album, et c'est ce que veux que les gens fassent, pour qu'ils gardent ces moments en tête et qu'ils les retrouvent en écoutant le disque. C'est comme ça que je ressentais les choses quand, plus jeune, j'allais voir des concerts de Talib Kweli ou de Common : je connaissais les singles, mais ils arrivaient à me convaincre d'aller acheter l'album pour pouvoir revivre ces moments.
Tu n'es pas fatiguée à force de te dépenser autant ?
Je suis tout le temps fatiguée ! Je dors beaucoup, tu n'imagines même pas ! Je pourrais m'effondrer au milieu d'une interview... ça m'est même déjà arrivé. C'est vrai que c'est épuisant, mais tu sais, je suis mon propre patron, je décide de ma vie, et ça demande beaucoup de travail. C'est un truc qu'ils ne te disent pas quand tu signes ton contrat avec un label : tu ne dormiras plus jamais !
Il est temps que je passe aux trois dernières questions, un peu plus courtes et légères. Tout d'abord, qu'est-ce que tu voudrais que les gens fassent en écoutant ta musique ?
Juste qu'ils passent un bon moment, qu'ils s'amusent. La musique est faite pour ça.
Tu as rencontré tellement de journalistes, qui t'ont posé tellement de questions différentes... est-ce qu'il y a malgré tout une question qu'on ne t'a jamais posée et à laquelle tu aurais aimé répondre ?
On ne m'a jamais demandé quelle était ma pointure ! Et je fais du 39 !
Tu es un peu obsédée par les chaussures, non ?
Un peu, oui ! Et pourtant on ne me pose jamais de question à ce sujet... mais bon, tu ne bosses pas pour un magazine de mode.
En effet ! Dernière question, rituelle : je voudrais que mon interview arrive en tête des recherches Google, alors est-ce que tu as une fausse rumeur à balancer sur toi-même ?
J'ai un troisième téton.
Lilly Allen a vraiment un troisième téton...
Sérieux ? Mince ! Bon, alors disons que j'ai fait l'amour au sommet de la Tour Eiffel.
C'est pas mal ! Merci beaucoup, Estelle.
Merci à toi, c'était un plaisir.
Un immense merci à Estelle pour sa disponibilité et sa gentillesse.
Un grand merci également à Carole et Romain, chez WEA/Warner Music France, sans qui cette interview n'aurait pu avoir lieu.
BONUS :
Devant une Maroquinerie modestement remplie, Estelle entre en scène dans une robe noire cintrée, fermée dans le dos par une Tour Eiffel brodée, hommage remarqué à ses hôtes du soir.
Le concert s'ouvre sur le très énergique et vintage Do My Thing, extrait de son dernier album, où il est interprété en duo avec la pétillante Janelle Monae. Après une reprise très inspirée du mythique You Can't Hurry Love des Supremes, Estelle revient à ses fondamentaux avec No Substitute Love et More Than Friends, tous deux tirés de l'album "Shine", qui l'a révélée au monde entier.
Le cur du concert est ensuite constitué d'un long medley, mélangé de reprises et de compositions. Un medley qui va crescendo et part du RnB assez classique de The Life pour aller vers le plus électrique International (Serious) avant de s'aventurer au très électro Freak et de terminer sur le carrément dance One Love (produit par David Guetta). Le public aura même droit à un petit bout du Niggas In Paris de son ami Kanye West et à quelques reprises. Ce medley se révèle redoutablement efficace pour faire danser un public que la chanteuse harangue sans relâche.
Le concert reprend ensuite une marche plus classique avec le très pop Back To Love, et la tension retombe enfin avec le bel enchaînement de Wonderful Life et Thank You, deux morceaux plus posés et plus émouvants, qui permettent d'apprécier toute la palette vocale d'une Estelle plus envoûtante que jamais. Le set s'achève finalement sur le premier single issu de "All Of Me" : Don't Break My Heart.
La chanteuse britannique est rappelée sur scène et lance l'inévitable American Boy, qu'elle laisse le public interpréter seul la plupart du temps. Le concert s'achève enfin (croit-on) sur une nouvelle reprise très réussie, cette fois du classique Blame It On The Boogie des Jackson 5.
Lorsqu'Estelle sort de scène, on croit en effet que c'est la fin, puisque les lumières se rallument, mais une partie du public continue d'applaudir et de scander son nom. La chanteuse et ses musiciens reviennent finalement pour deux ultimes titres dont Fall In Love.
Devant une salle peu remplie, en dépit de la notoriété mondiale de l'artiste, Estelle aura usé de tous ses talents de showgirl hors pair pour mettre une énorme ambiance à l'unique date française de sa tournée. Allant chercher sans relâche les spectateurs, s'adressant à eux presque un par un, jouant avec le public jusqu'à séduire les plus sceptiques et à faire se déhancher les plus rouillés, la chanteuse britannique a défendu brillamment sa réputation scénique. En livrant un set parfaitement équilibré et en ne reculant pas devant de très judicieuses reprises, celle qui est connue avant tout pour son tube American Boy sera presque parvenue à faire oublier le titre, qui ne se démarque finalement pas d'une prestation de haut niveau. A aller voir sans aucune hésitation, si l'occasion vous en est donnée !
Tu es devenue mondialement célèbre grâce au tube American Boy... première question : est-ce que tu n'es pas fatiguée de le jouer ?
Absolument pas, au contraire, j'adore le jouer ! C'est le genre de titres dont tout artiste rêverait pour lancer une carrière internationale. Et puis le public m'aide bien en le chantant avec moi.
Après l'énorme succès de cette chanson, est-ce que tu as eu peur de n'être plus que "la chanteuse d'American Boy" ?
Non, quatre ans avant ce morceau, j'avais sorti 1980, qui avait déjà eu un gros succès. Je ne me pose pas trop ce genre de questions, je fais ce dont j'ai envie et je continue d'avancer. Si je devais être inquiète de quelque chose, ce serait plutôt de ne plus pouvoir chanter un jour... Tant que tu continues à faire de la bonne musique, les gens ont envie de l'acheter et de l'écouter. Moi, je veux juste continuer à faire de la musique que les gens ont envie d'écouter.
Tu n'as ressenti aucune pression ?
Non, je pense que si tu te mets la pression, si tu te dis "oh mon dieu, je dois faire un autre American Boy", tu te sabordes toi-même. Ca fait quatre ans que la chanson est sortie et les gens continuent de la chanter comme si c'était hier.
C'est vrai que tu as laissé passer quatre ans entre chacun de tes albums, ça aussi, ça peut mettre une certaine pression, parce que les gens espèrent un résultat à la hauteur de l'attente...
J'écris des chansons sur ce que je pense et ce que je ressens, donc j'ai besoin de vivre des choses pour écrire dessus et, forcément, ça prend du temps. Mais maintenant que j'ai fait trois albums, j'écris beaucoup plus vite qu'avant. Et puis je pense aussi avoir franchi un cap en tant que femme, donc le prochain ne sortira pas dans quatre ans. En fait, j'aimerais en sortir un par an, ça me paraît être un bon rythme. Donc à la fin de cette année ou l'année prochaine, vous devriez avoir le quatrième !
Tes fans vont être surpris...
Oui, mais j'espère surtout qu'ils seront contents !
On parlait d'American Boy... c'était un duo avec un ami à toi, Kanye West, qui a sorti cette année l'album "Watch The Throne" avec Jay-Z, et maintenant ils font une tournée ensemble : est-ce qu'il y a un artiste avec qui tu pourrais faire ce genre de collaboration ?
Je dirais Swizz Beatz... Je pourrais vraiment faire un album entier et partir sur la route avec lui. Ce serait génial !
Puisqu'on parle de collaboration, tu as travaillé avec énormément d'artistes : John Legend, Kanye West, Janelle Monae, Rick Ross, Chris Brown, David Guetta... avec qui aimerais-tu collaborer dans les années à venir ?
Mary J. Blige.
Ce serait énorme !
Oui, ce serait vraiment incroyable !
Un autre peut-être ?
C'est difficile. Surtout quand tu as travaillé avec des gens du calibre de John Legend ou Kanye West, ça devient compliqué de trouver des artistes avec qui collaborer. J'aimerais bien faire quelque chose avec des artistes country, comme Carrie Underwood, que j'adore.
Est-ce que tu peux nous raconter ta rencontre avec David Guetta ?
Je l'adore ! C'est lui qui a demandé à travailler avec moi et on s'est finalement retrouvé en studio à Miami en 2009. Je voulais vraiment rencontrer ce type dont j'avais tellement entendu parler et puis voilà, ça s'est fait assez simplement. Depuis, on s'apprécie vraiment beaucoup ; lui et sa femme sont des gens extraordinaires. Ils font de la musique, ils ne sont pas là pour l'argent, et j'aime cette approche des choses. Et puis il est tellement gentil... je veux dire, en tant que personne, il est vraiment adorable.
Quand je pense à des artistes comme Roots Manuva, Dizze Rascal, Plan B, Professor Green, The Streets et plus récemment Rizzle Kicks, j'ai le sentiment qu'il y a quelque chose de très spécifique dans le RnB et le hip hop britannique, qu'est-ce que tu en penses ?
C'est vrai, et ça prouve qu'on continue d'aller de l'avant et de faire avancer la musique britannique dans le monde. Je viens de l'époque de Roots Manuva et je trouve ça génial d'être encore là à celle de Rizzle Kicks. Pour moi, c'est vraiment ça le plus important, ça me rend juste heureuse et fière et j'en remercie Dieu chaque jour.
Tu penses qu'il y a une façon britannique de faire du RnB et du hip hop, une sorte de "son anglais" ?
Eh bien oui, ce son vient de tout un tas d'influences qui nous rendent uniques, de toute l'histoire musicale de notre pays.
Tu parles souvent du temps que ça t'a pris et de tout le travail que tu as du accomplir pour arriver là où tu en es aujourd'hui, est-ce que tu dirais que tu es un exemple pour les jeunes ?
Ca, c'est aux gens de le dire, mais je continue de travailler tous les jours et je crois que oui, en ce sens, mon parcours est plutôt un exemple à suivre. Il y a plusieurs filles à Londres qui me disent qu'elles venaient à mes séances de dédicaces il y a quelques années et que maintenant, elles ont fait leur chemin, elles ont monté leur propre label, elles se sont servies de ce que j'ai fait et elles cartonnent. Mais je ne veux pas être plus qu'une forme d'inspiration. Et encore une fois, je suis juste heureuse d'être là ; je ne pouvais pas prévoir comment se déroulerait ma vie, je suis très reconnaissante.
Je suppose que ça aide aussi à garder les pieds sur terre...
Oh oui !
Tu as déménagé aux Etats-Unis il y a cinq ans, est-ce que tu penses qu'un artiste doit aller en Amérique pour réussir ?
Non, mais pour moi, c'était vital ! C'est une partie importante de mon histoire, mais ce n'est pas un passage obligé pour tout le monde : quand je vois ce que fait Tinie Tempah par exemple... je trouve ça super.
Tu voyages énormément, est-ce que les endroits où tu vas ont une influence sur ta musique ?
Oui, je regarde les chaînes musicales de tous les pays où je passe ! Je suis curieuse de voir à quoi ressemble la scène locale, alors je regarde les clips... après tout, c'est comme ça que j'ai eu envie de faire de la musique. C'est toujours bien de découvrir des choses nouvelles, de nouveaux sons, de nouvelles énergies. Tout ça se retrouve sur mes albums.
Puisque nous sommes sur Concert & Co, on va parler un peu de live. Est-ce que tu te décrirais plus comme une artiste de studio ou une artiste de scène ?
La scène, sans hésiter ! Quand j'ai commencé, le passage en studio était pour moi un moyen d'arriver à la scène : en gros, je devais enregistrer ce que j'allais jouer. Aujourd'hui, je me sens mieux en studio, je m'y sens plus libre d'écrire ce que je veux et j'apprécie d'y passer du temps.
Comment est-ce que tu abordes la transposition de ta musique sur scène ?
J'essaye de la changer autant que je peux ! Je suis vraiment le genre de filles qui rend ses musiciens fous, parce que tous les jours, il y a des choses que je veux modifier. Ils me détestent autant qu'ils m'adorent pour ça : le résultat est génial, mais ça leur donne beaucoup de travail. On fait tous les soirs un concert différent ; je crois que sinon je m'ennuierais.
Donc on peut aller voir chaque concert de ta tournée...
...et tu ne verras jamais deux fois le même !
Si tu devais nous donner ta recette d'un bon concert, en quelques mots ?
Je crois qu'il faut que tu croies à ce que tu fais et que tu t'amuses. J'aborde tous les publics comme s'ils ne connaissaient pas mes chansons et que je devais les conquérir, les convaincre. Même si j'ai beaucoup de fans, je fais chaque concert comme s'ils ne me connaissaient pas. C'est comme ça que j'arrive à mettre autant d'énergie dans mes performances scéniques. Tu ne peux pas connaître les paroles et chanter en chur avant d'avoir acheté l'album, et c'est ce que veux que les gens fassent, pour qu'ils gardent ces moments en tête et qu'ils les retrouvent en écoutant le disque. C'est comme ça que je ressentais les choses quand, plus jeune, j'allais voir des concerts de Talib Kweli ou de Common : je connaissais les singles, mais ils arrivaient à me convaincre d'aller acheter l'album pour pouvoir revivre ces moments.
Tu n'es pas fatiguée à force de te dépenser autant ?
Je suis tout le temps fatiguée ! Je dors beaucoup, tu n'imagines même pas ! Je pourrais m'effondrer au milieu d'une interview... ça m'est même déjà arrivé. C'est vrai que c'est épuisant, mais tu sais, je suis mon propre patron, je décide de ma vie, et ça demande beaucoup de travail. C'est un truc qu'ils ne te disent pas quand tu signes ton contrat avec un label : tu ne dormiras plus jamais !
Il est temps que je passe aux trois dernières questions, un peu plus courtes et légères. Tout d'abord, qu'est-ce que tu voudrais que les gens fassent en écoutant ta musique ?
Juste qu'ils passent un bon moment, qu'ils s'amusent. La musique est faite pour ça.
Tu as rencontré tellement de journalistes, qui t'ont posé tellement de questions différentes... est-ce qu'il y a malgré tout une question qu'on ne t'a jamais posée et à laquelle tu aurais aimé répondre ?
On ne m'a jamais demandé quelle était ma pointure ! Et je fais du 39 !
Tu es un peu obsédée par les chaussures, non ?
Un peu, oui ! Et pourtant on ne me pose jamais de question à ce sujet... mais bon, tu ne bosses pas pour un magazine de mode.
En effet ! Dernière question, rituelle : je voudrais que mon interview arrive en tête des recherches Google, alors est-ce que tu as une fausse rumeur à balancer sur toi-même ?
J'ai un troisième téton.
Lilly Allen a vraiment un troisième téton...
Sérieux ? Mince ! Bon, alors disons que j'ai fait l'amour au sommet de la Tour Eiffel.
C'est pas mal ! Merci beaucoup, Estelle.
Merci à toi, c'était un plaisir.
Un immense merci à Estelle pour sa disponibilité et sa gentillesse.
Un grand merci également à Carole et Romain, chez WEA/Warner Music France, sans qui cette interview n'aurait pu avoir lieu.
BONUS :
Devant une Maroquinerie modestement remplie, Estelle entre en scène dans une robe noire cintrée, fermée dans le dos par une Tour Eiffel brodée, hommage remarqué à ses hôtes du soir.
Le concert s'ouvre sur le très énergique et vintage Do My Thing, extrait de son dernier album, où il est interprété en duo avec la pétillante Janelle Monae. Après une reprise très inspirée du mythique You Can't Hurry Love des Supremes, Estelle revient à ses fondamentaux avec No Substitute Love et More Than Friends, tous deux tirés de l'album "Shine", qui l'a révélée au monde entier.
Le cur du concert est ensuite constitué d'un long medley, mélangé de reprises et de compositions. Un medley qui va crescendo et part du RnB assez classique de The Life pour aller vers le plus électrique International (Serious) avant de s'aventurer au très électro Freak et de terminer sur le carrément dance One Love (produit par David Guetta). Le public aura même droit à un petit bout du Niggas In Paris de son ami Kanye West et à quelques reprises. Ce medley se révèle redoutablement efficace pour faire danser un public que la chanteuse harangue sans relâche.
Le concert reprend ensuite une marche plus classique avec le très pop Back To Love, et la tension retombe enfin avec le bel enchaînement de Wonderful Life et Thank You, deux morceaux plus posés et plus émouvants, qui permettent d'apprécier toute la palette vocale d'une Estelle plus envoûtante que jamais. Le set s'achève finalement sur le premier single issu de "All Of Me" : Don't Break My Heart.
La chanteuse britannique est rappelée sur scène et lance l'inévitable American Boy, qu'elle laisse le public interpréter seul la plupart du temps. Le concert s'achève enfin (croit-on) sur une nouvelle reprise très réussie, cette fois du classique Blame It On The Boogie des Jackson 5.
Lorsqu'Estelle sort de scène, on croit en effet que c'est la fin, puisque les lumières se rallument, mais une partie du public continue d'applaudir et de scander son nom. La chanteuse et ses musiciens reviennent finalement pour deux ultimes titres dont Fall In Love.
Devant une salle peu remplie, en dépit de la notoriété mondiale de l'artiste, Estelle aura usé de tous ses talents de showgirl hors pair pour mettre une énorme ambiance à l'unique date française de sa tournée. Allant chercher sans relâche les spectateurs, s'adressant à eux presque un par un, jouant avec le public jusqu'à séduire les plus sceptiques et à faire se déhancher les plus rouillés, la chanteuse britannique a défendu brillamment sa réputation scénique. En livrant un set parfaitement équilibré et en ne reculant pas devant de très judicieuses reprises, celle qui est connue avant tout pour son tube American Boy sera presque parvenue à faire oublier le titre, qui ne se démarque finalement pas d'une prestation de haut niveau. A aller voir sans aucune hésitation, si l'occasion vous en est donnée !
Interview réalisée le 01 mai 2012 par Fredc
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