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Chronique de concert Interview de OneTwo
Vendredi 22 novembre 2024 : 6660 concerts, 27230 chroniques de concert, 5420 critiques d'album.
Interview de OneTwo
Pour la première interview que je donnais, c'en fut une belle ! (en fait, pas tout à fait la première car à l'occasion d'un voyage d'étude au Québec, j'avais déjà été amené à interviewer des gens du milieu de la musique, dont des artistes et notamment le groupe électro Angry White Mob, mais ça remonte à loin (1993) et ça avait un côté moins "officiel").
Effectivement, en cette belle après-midi du samedi 20 septembre 2008, nous attendaient à la terrasse du Bataclan Café, moi et mon frère, deux de mes "héros" musicaux : Paul Humphreys, d'Orchestral Manuvres in the Dark, et Claudia Brücken, ex-Propaganda (mais le "ex" ne sera peut-être pas éternel, nous le verrons).
Quelle gentillesse, bonne humeur et simplicité de la part de ces gens qui connurent la gloire, et pas juste le temps d'un tube, eux comme leurs deux acolytes musiciens (dont l'un, Philip Larson, fait pourtant partie des Manhattan Clique, qui bossent avec plein de géants de la musique, et pourrait donc "se la pêter" aussi) !
Bref, une interview tout sauf formelle, un véritable échange, joyeux, et ce fut appréciable, surtout pour des journalistes amateurs comme nous !
Et puis Claudia m'a dit aimer mon T-Shirt, donc pour quelqu'un qui de coutume se fout un peu de comment ils s'habille, ça marque ;-)
F, à CB : En 1987, j'étais trop jeune pour venir à Paris vous voir jouer avec Propaganda. Voyant que Claudia semble ne pas s'en souvenir :Vous n'avez pas joué à Paris ?
CB : Si, nous y avons joué, mais où ? Je ne me souviens pas où nous avions joué. ZeN [co-organisateur de l'Electro Night Live festival et leader des Waiting For Words] m'a confirmé que nous y avions joué, et de toute façon j'en suis sûre.
PH : Vous avez joué à Paris, moi aussi j'en suis sûr, j'ai lu ça quelque part.
CB : Bon, je ne m'en rappelle pas, mais je me rappelle par contre bien du concert.
PH : Aux Bains douches, peut-être ? Parce que moi j'ai joué [avec OMD] aux Bains douches au tout début des années 80 [avril 1980, pour être plus précis].
CB : Je n'en sais rien.
Claudia Brücken, Electro Night Live Festival, 20/09/2008
F : Dans quelles circonstances vous êtes-vous rencontrés ?
PH : En fait, nous nous sommes rencontrés en 1984 ou 85, à l'occasion d'un festival Greenpeace à Rotterdam, où OMD, INXS et Propaganda étaient à l'affiche.
F : J'ai un bootleg (enregistrement pirate) de ça ! [26/10/85, at Veronica]
PH : Ha, un bootleg ? (rires)
F : C'est vrai que je ne devrais pas vous le dire !
PH : Je suis au courant de l'existence de ces bootlegs.
F : Mais soyez assuré que je n'en ai jamais fait commerce !
PH, toujours riant : Non, mais il circule pas mal de bootlegs de ce concert en fait.
CB : En tout cas ce fut un grand moment, vraiment un gros concert.
PH : Oui, ce fut un excellent concert.
PH : Et donc nous nous sommes rencontrés en coulisses, mais nous n'avons pas vraiment eu le temps de parler ensemble. Et ce ne fut pas avant le milieu des années 90 que nous pûmes nous rencontrer véritablement, quand je vins au Midem à Cannes en tant que professionnel car j'étais en charge alors d'un label indépendant à Liverpool, sur lequel j'avais quelques groupes.
F : Telegraph ?
PH : Oui, Telegraph. J'avais China Crisis et quelques autres groupes de signés sur ce label. Et je venais donc au Midem pour essayer de nouer quelques affaires pour China Crisis.
PH : D'ailleurs, puisqu'on en parle, ils vont jouer avec nous, nous attaquons une tournée dans quelques semaines, et China Crisis fait nos premières parties !
CB : d'OMD.
PH : Oui, c'est OMD qui va faire la tournée [pas OneTwo].
Paul Humphreys, Electro Night Live Festival, 20/09/2008
PH : Donc j'étais au Midem à Cannes pour China Crisis, et quand vous y allez en tant que label, tout le monde sait que vous êtes là, ce qui fait qu'un type m'a appelé, que je pensais intéressé par l'un de mes groupes, mais qui en fait était intéressé par Claudia... pour signer Claudia.
F : sur Telegraph ?
PH : Non, c'était un type d'un label allemand, intéressé pour faire un album solo pour Claudia.
CB : Je voulais faire mon deuxième album solo.
PH : Alors ce type cherchait des co-auteurs intéressés pour écrire avec ses musiciens l'album de Claudia. Comme j'étais intéressé, je lui ai demandé le numéro de Claudia pour qu'on voie ensemble si ça pouvait marcher. Donc je l'ai appelé, nous nous sommes rencontrés, et nous fûmes très motivés.
CB : Oui.
PH : Et nous nous sommes mis à écrire des chansons, mais il fallut rapidement arrêter car Claudia était impliquée dans d'autres projets.
En fait, que s'est-il passé après ça ? Pour ma tournée aux Etats-Unis en 2000, j'ai demandé à Claudia si elle voulait m'accompagner en tant que chanteuse "guest".
C'est à ce moment que nous avons réellement réalisé que nous pourrions être un groupe. Car nous avons décidé d'essayer plusieurs chansons, et tout fonctionnait parfaitement à chaque fois.
CB : oui, et nous avons apprécié de constater que nous avions un très bon rapport sur scène. Andy [McCluskey, l'autre pilier et chanteur d'OMD] n'avait pas pu venir pour cette tournée, donc je me suis jointe à Paul, et en fait, cela fonctionnait très bien. Nous avons rendu justice aux chansons ; Ce que je veux dire, c'est que nous n'avons pas fait les chansons complètement comme OMD les faisaient car j'étais une chanteuse, mais c'était proche.
PH : Je connaissais Claudia depuis un moment, et comme elle n'avait pas fait de concert depuis longtemps, j'ai pensé qu'elle ne pourrait pas monter sur scène sans chanter une paire de chansons de Propaganda. Alors nous avons joué quelques titres de Propaganda, des titres d'OMD, et nous avons essayé aussi nos nouvelles compositions. Et j'ai pris conscience de ce qu'est devenu depuis OneTwo.
CB : Nous avons réalisé, après cette tournée, comment nous pourrions peut-être aller un peu plus loin ensemble. Ainsi, nous avons développé l'idée.
F : Avant votre première rencontre en 1985, aviez-vous déjà entendu vos musiques respectives ?
PH : Oui, nous savions ce que faisait l'autre, moi j'étais un grand fan de Claudia.
F, à CB : Quels sont les titres composés ou chantés par Paul que vous préférez ?
CB : J'aime vraiment des chansons comme "So in Love", un grand titre, "If you Leave", et de nombreux autres : "Messages", excellent aussi, ou encore "Souvenir". En fait, il y en a tant que j'ai du mal à choisir !
PL : "(Forever) Live & Die" ?
CB : Ce n'est pas l'un de mes favoris. Mais j'aime aussi beaucoup "Stanlow" ou "Sealand". J'adore "Electricity", qui est pour moi un titre très familier, qui me ramène à mes sources et me parle, votre premier single, c'est ça ?
PH : oui, c'était une espèce de titre punk avec des synthés, vraiment un beau mélange.
F, à PH : Et vous, Paul, inversement, quels sont les vieux titres dans lesquels Claudia chante que vous préférez ?
PH : Je me souviens avoir découvert "Dr Mabuse" à la radio, j'allais en studio avec Andy, et en entendant ça, nous tombèrent tous deux absolument sous le charme. J'ai dit à Andy "Wow, quelle voix incroyable elle a, cette fille, il faut que je trouve plus de choses sur elle" !
PL et CB, riant : C'est vrai ?
PH : C'est parfaitement vrai, Andy s'en souvient aussi.
CB : Ho, c'est tellement gentil !
F : Un titre excellent effectivement, avec un clip génial aussi !
CB : Oui, tout à fait.
F : Est-ce que le fait de remonter ensemble sur scène, quand vous avez joué aux Etats-Unis, vous a rassurés ou renforcés mutuellement... était-ce plus facile de jouer ensemble que seuls ?
PH : En fait, nous n'étions pas que deux, nous avions monté un gros groupe, il y avait six musiciens.
F, aux deux autres musiciens présents : Vous y étiez déjà ?
CB : Non, là c'était des musiciens américains.
PL : Bien plus professionnels !
PH : un grand rire
CB : Non, nous devons dire que ces quatre dernières années, nous avons vraiment amélioré notre spectacle. Aux débuts, en 2000, c'était un peu... comme une messe, vous voyez ce que je veux dire ? Mais pas dans le mauvais sens.
PH : Dans le bon sens du terme, même.
CB : Oui, car c'était comme si il y avait une idée essayant de faire fonctionner les choses. Mais depuis nous avons vécu tant de concerts que maintenant nous savons réellement ce que nous jouons et ce que nous faisons, ça fonctionne.
PH : C'est maintenant un groupe établi, depuis des années.
CB : Nous avons travaillé, travaillé, et nous nous sommes passionnés pour tout ça, ainsi aujourd'hui -vous aurez l'occasion de vous en rendre compte ce soir- c'est beaucoup plus que ce que ça a pu être à nos débuts.
PH : Oui, ce soir vous allez entendre ce que OneTwo est vraiment, quelle est la vision que nous avions de OneTwo qui prends corps juste maintenant.
F, aux deux musiciens : Pourriez-vous vous présenter ?
PH : James Watson, claviers et guitare (de Londres) et Philip Larson, claviers (de Douvre)
F : Vous n'avez pas de batteur ?
PH : Non, le batteur est un concept qui appartient au siècle passé ! (rires)
CB : Ne racontez pas ça à Mal [Malcolm Holmes, le batteur d'OMD]! (rires)
PH : Il n'aimerait pas ça. (rires)
CB : Mais toute la façon de jouer de Mal est très différente, je pense.
PH : Mal joue comme un métronome, vous savez ?
CB : C'est un véritable "électro-batteur".
PL : C'est en quelque sorte un "électronome". (nombreux rires)
F, à PL et JW : C'est facile de jouer avec Paul et Claudia ?
OneTwo : rires
HH : Vous êtes tenus de répondre que oui !
OneTwo : rires
PL et JW : Ils sont accommodants, prennent les choses tranquillement.
PH : Oui, nous avons laissé à ces gars une certaine liberté dans la façon de jouer. Et comme en concert, nous ne pouvons pas développer les chansons comme nous l'avons fait sur l'album, ces gars se chargent de le faire à leur sauce [les solos de guitare de JW notamment se démarquent des versions album].
Et j'adorerais leur confier une part du travail en studio maintenant. Je pense donc que pour le prochain album, nous tâcherons de travailler ensemble sur les nouveaux titres, avant de les enregistrer.
PL : Et il faudra jouer les nouveaux titres sur scène.
PH : Oui, avant que nous ne les enregistrions, il nous faudra faire quelques concerts. Ainsi le résultat sera meilleur.
CB : Je pense vraiment que c'est une bonne façon de travailler en fait : essayer les titres ensemble avant des les enregistrer, sortir et les jouer live, puis les peaufiner.
PH : Nous avons fait près de 60 concerts de OneTwo ces dernières années, ce qui est énorme, vous savez, et donc nous pouvons faire progresser la qualité de ces concerts en essayant de nouvelles choses.
PL : Ce soir, nous allons toutes les essayer !
PH : Oui ! (rires)
OneTwo au complet
HH : J'ai lu quelque part que le prochain album de OneTwo pourrait être plus industriel. Pouvez-vous nous en dire un peu plus ?
PH : Oui, j'aimerais qu'il sonne un petit peu plus "industriel", plus dur que le premier, avec un petit peu plus de choses qui bougent cette fois. Et je pense que l'album "Instead" était une sorte de méli-mélo d'idées que nous avions depuis de nombreuses années. Alors je pense que le nouvel album que nous allons faire sera davantage constitué "d'idées de maintenant", véritablement.
CB : Parfois, les idées (les projets ou les groupes eux-mêmes) évoluent, si vous leur laissez le temps de le faire. L'année dernière, nous avons fait beaucoup de scène ; Les chansons ont eu l'occasion d'évoluer à cette occasion.
Notre mode d'écriture des chansons a évolué de la même façon : quand Paul et moi avons commencé OneTwo, l'idée était que nous trouvions un exutoire pour la musique de chacun. Paul a amené ses chansons, j'ai amené mes chansons et nous avons écrit ensemble d'autres titres. Il s'agissait de trouver la façon de "faire sortir" notre musique, pour les autres.
PH : Mais désormais nous avons atteint un autre stade car nous savons -et honnêtement depuis peu- ce que OneTwo est réellement. Nous comprenons ce qu'est OneTwo et en conséquence nous savons ce que nous devrions faire ensuite, donc nous n'avons plus qu'à le faire ! En quelque sorte, nous avons enfin inventé le groupe.
F : Est-ce que les synthétiseurs sont toujours aussi importants pour vous qu'ils ne l'étaient dans les années 80 ?
PH : Oui, ils restent très importants. Pour moi, ils sont même cruciaux.
CB : C'est la même chose pour moi, mais j'aime aussi simplement écrire des chansons juste sur une guitare. La guitare a ses avantages. Par exemple, ça a été la panique l'autre jour dans un gros festival à Leipzig (près de 10.000 personnes) [le Wave Gotik Treffen, le 11 mai 2008] : nous avons eu une coupure totale d'électricité sur scène, et toutes les affectations de samples sur les claviers ont été perdues à cause de ça. Il a fallu plusieurs minutes pour les récupérer, et pendant ce temps, nous ne pouvions qu'utiliser la guitare. Et finalement c'était tellement beau !
HH : Quels sont vos synthétiseurs favoris ?
CB : Le Roland Jupiter 8, qui a un son très singulier, et j'adore le PPG Wave, utilisé par Michael [Mertens, le cur de la composition de Propaganda].
PH : Pour moi c'est délicat à trancher car j'adore les synthétiseurs et ils ont chacun leurs propres mérites, vraiment. Le Jupiter 8 aussi, le Korg MS-20, le Prophet 5 de Sequential Circuits (je l'ai utilisé pour faire plusieurs albums), l'Oberheim Rack. Egalement les synthétiseurs virtuels Absynth et Massive.
JW et PL : Le Moog Prodigy...
PH : Moi je ne suis pas un fan des Moog.
JW et PL : ...l'Oberheim Expander, le Roland SH-101.
PH : Ha oui zut [je traduis "soft"], je suis sponsorisé par Roland, et je dois dire aussi que j'adore absolument ce synthé ! Ainsi que le X8, une veritable création de génie !
FH : Est-ce que d'autres collaborations, comme celles de Martin Gore ou Andy McCluskey sur l'album, sont prévues ou même juste envisagées ?
PH : Nous sommes vraiment ouverts aux collaborations et nous les apprécions.
Désignant PL et JW : J'ai déjà l'intention d'impliquer ces deux gars davantage, pour l'écriture. Vous savez, nous apprécions les collaborations.
F : Claudia a fait beaucoup de collaborations, n'est-ce pas ?
CB : Oui. Je crois que ça a quelque chose à voir avec mon départ de Propaganda. Je fus totalement livrée à moi-même à cette époque. Act n'avait jamais été pensé comme un groupe ou pour durer. Cela ne fut qu'un moment dans ma carrière. Après Propaganda, en fait, j'ai toujours travaillé en collaboration, et je m'en satisfaisais, car on peut apprendre tant de choses en chemin, et on apprend à lutter contre l'adversité.
Mais je dois reconnaître que d'un autre côté j'apprécie tout particulièrement OneTwo, comme j'aime l'idée de groupe. Car on y on trouve normalement la solidarité. Propaganda était un bon groupe, auquel il manquait justement une seule chose : le sens de la solidarité. Quand je faisais mon projet solo, j'avais à me battre toute seule car j'étais responsable de tout, de toutes les décisions. Dans un groupe, vous agissez ensemble, vous n'êtes pas seule dans les hôtels, les membres s'apprécient, tout le monde sait quelle est sa place.
PH : Et chez OneTwo, il n'y a pas d'ego. Nous sommes des amis qui passent de bons moments ensemble, ce qui est bien. A la base, nous sommes tous des amis, nous avons plaisir à nous retrouver et nous nous respectons les uns les autres. Chacun apprécie la compagnie de l'autre, de jouer avec les autres ; Vous verrez plus tard, la joie que nous avons à jouer ensemble sur scène, nous adorons ça, vous savez.
F, à CB : De toute façon, rien n'empêche que vous ne soyez dans un groupe, tout en continuant à collaborer avec d'autres ?
CB : Oui, absolument.
PH : Moi je fais OMD en ce moment.
F : Oui, une grande collaboration !
PH : (rires)
Le souci avec les collaborations ponctuelles, c'est qu'elles ne sont justement, que des collaborations d'un instant, c'est leur côté négatif.
F : Connaissez-vous, et le cas échéant appréciez-vous, des artistes de la scène électro/synthpop française ou, plus largement, des artistes français ?
CB : J'adore Charlotte Gainsbourg, la fille de Serge Gainsbourg, avec son album "5.55", qui est excellent.
HH : avec Air
CB : Air, c'est fantastique également.
PH : Oui, c'est un grand groupe.
CB : Serge Gainsbourg lui-même aussi, et tout ce genre de choses anciennes. J'aime beaucoup Jacques Brel. Mais pour la scène électronique française, je ne m'avancerai pas, je ne connais pas vraiment.
PH : J'ai pu entendre quelques trucs français, vous savez, de gens qui m'envoient des liens sur mon MySpace, des chanteurs et des groupes. Mais le problème avec les Britanniques, c'est que nous sommes très insulaires, et si vous ne chantez pas en Anglais, alors vous n'intéresserez pas la presse et les charts. C‘est vraiment ennuyeux. Et donc, si un groupe français chante en Français, il n'aura aucune exposition du tout au Royaume-Uni. C'est la simple réalité, mais une terrible réalité, vraiment. Car je suis pour ma part ouvert à toutes les langues.
F, à PH : Paul, avez-vous gardé le contact avec Etienne Daho, avec qui OMD fit une version de "So in Love" pour l'émission "Les enfants du rock" en 1985 ?
PH : Je l'ai vu l'an dernier en fait, une rencontre assez amusante !
J'étais... nous étions en train de masteriser "Instead" à Londres (au Sunset Studio), je me rendais à la salle de masterisation (vous savez, la masterisation est la dernière chose que vous faites : compiler l'album en studio). J'étais donc en train de marcher dans le couloir quand je vis Etienne passer.
Je dis "Etienne !"
"Paul !" (rires)
"Que fais-tu ici ?"
Il faisait la même chose que moi : il était en train de masteriser un nouvel album.
C'est L'endroit à Londres où on masterise les disques, donc je n'étais donc pas vraiment étonné de sa présence ici, mais c'était une telle coïncidence de le croiser, je ne l'avais pas revu depuis des années, vous savez !
Il a évoqué que je puisse produire son nouvel album, mais j'étais trop occupé avec la tournée OMD. Et il ne pouvait pas m'attendre. Il voulait que je lui fasse un disque, et je lui ai répondu : "J'adorerais faire ton disque mais je pars pour une tournée de cinq mois avec OMD.". Il m'a dit "Paul, désolé, je vais le faire avec quelqu'un d'autre."
Assez marrant... (rires)
F, à CB : Une question classique : qu'en est-il d'un nouvel album de Propaganda ?
CB : Il faut reconnaître que nous n'avons pas laissé tomber l'idée de faire un autre album, car nous avions beaucoup aimé l'album "A Secret Wish", entièrement. Il signifiait beaucoup pour les gens, et pour nous.
Ainsi, nous avons essayé de faire quelque chose il y a deux ans... qui ne fonctionna pas, à nouveau [par le passé, les anciens du groupe avaient déjà essayé de le relancer, sans grand succès].
C'est juste que ça traînait trop en longueur, et donc j'ai perdu mon enthousiasme à nouveau. Car vous pouvez être excessivement anxieux de constater que ce que vous faites n'est pas aussi parfait que vous le souhaiteriez. Parfois les gens ont tellement peur de ne pas atteindre leur idéal qu'ils préfèrent s'arrêter, plutôt que de ne pas être à la hauteur.
Mais peut-être, il faut l'espérer, nous parviendrons à régler ce problème un jour. (rires)
Nous nous parlons tous les uns les autres, nous nous respectons toujours tous (Michael [Mertens] est venu nous voir jouer avec OneTwo et il aime vraiment ce que nous faisons). Donc tout le monde est en bons termes. C'est un très bon départ à nouveau.
F : ... et le nouvel album de OneTwo ?
CB : Il progresse lentement.
PH : Oui, il progresse lentement... très lentement ! (rires)
CB : James et moi travaillons sur le projet en ce moment.
JW : En progression !
PH : Nous sommes seulement en train de progresser. (rires) Mais nous en parlons tous !
CB : Nous travaillons sur des reprises, de Neil Young plus précisément. Que nous revisitons de manière électronique, très "space" et minimaliste.
PH : Oui, l'unique titre que j'ai entendu est réellement fantastique, terrible !
JW : L'unique...
PH : L'unique, oui ! (rires)
CB : Effectivement, nous en avons faite une, de reprise, qui est très belle et très bien. James et moi avons découvert en tournée que nous avons et partageons un grand amour pour Neil Young.
[James nous a fait écouter le début de la reprise sur un petit enregistreur, qui sonnait bien OneTwo, mais je ne saurais pas dire de quel titre il s'agissait.]
CB : Une direction complètement différente, pour cette grande chanson !
HH : Allez-vous jouer certains de ces nouveaux titres ou reprises ce soir ?
CB : Non.
PH : Ce soir, nous allons jouer un mélange d'"Instead" et de quelques titres de Propaganda et d'OMD.
F : ...et des titres de Act ?
CB : Nous pourrions le faire, mais ce soir le set n'est pas assez long pour nous permettre de jouer des titres de Act. [1h15]
PH : Parfois nous jouons "Absolutely Immune", ou "Snobbery & Decay".
F : Les meilleurs !
CB : Oui.
Mais il y a une autre raison si nous ne jouons pas de titres de Act ce soir : pour tous les membres de Propaganda, l'année 1986 fut bizarre, car "A Secret Wish" sortit en 1985, "Mabuse" en 1984, mais pour quelque étrange raison, en 1986 nous eûmes à aller en France tout le temps, grâce à "p;Machinery", qui était devenu un tel hit chez vous. Alors, nous venions en France, nous faisions un tas d'émissions TV, et on s'éclatait tellement ! Je tiens donc à jouer des titres de Propaganda ce soir à Paris, c'est pour moi tout spécialement, en écho aux moments très spéciaux que j'ai vécu ici.
Donc, aujourd'hui, pas de Act !
F et HH : Un grand merci pour le temps que vous nous avez consacré pour l'interview !
PH : Je pourrais parler de musique électronique pendant des jours ! (rires)
Ma chronique du concert donné le soir au Bataclan est disponible ici : ici
Merci à Stéphane Vasco pour les belles photos, prises pendant ledit concert. Au complet (celles de OneTwo mais aussi des autres artistes), elles sont visibles : là
Le site officiel de OneTwo est le suivant : www.theremusic.com
J'évoque aussi un peu le groupe mais surtout l'ensemble de la carrière de Paul Humphreys sur mon site, centré sur Orchestral Manuvres in the Dark : https://pagesperso-orange.fr/floribur/OMD/
Enfin, pour les spécialistes, mon frère (qui en fait partie) avait réalisé il y a quelques années un site très pratique de référencement des synthétiseurs (plutôt les vieux, les analogiques), dans lequel vous pourrez piocher pour retrouver les synthés cités par les membres de OneTwo :
➢ Roland Jupiter 8 : https://hhh.multimania.com/SYNTHES/NonMidi/ROLAND_JP8.htm
➢ Roland SH-101 : https://membres.lycos.fr/hhh/SYNTHES/NonMidi/ROLAND_SH101.htm
➢ Roland X8 : https://hhh.multimania.com/SYNTHES/Midi/ROLAND_X8.htm
➢ PPG Wave : https://hhh.multimania.com/SYNTHES/NonMidi/ROLAND_JP8.htm
➢ Korg MS-20 : https://membres.lycos.fr/hhh/SYNTHES/NonMidi/KORG_MS20.htm
➢ Sequential circuits Prophet 5 :
➢ Oberheim rack/expander
➢ Moog Prodigy : https://membres.lycos.fr/hhh/SYNTHES/NonMidi/MOOG_Prodigy.htm
➢ synthés virtuels Absynthe & Massive :
https://www.native-instruments.com/index.php?id=absynth4
https://www.native-instruments.com/index.php?id=massive
Effectivement, en cette belle après-midi du samedi 20 septembre 2008, nous attendaient à la terrasse du Bataclan Café, moi et mon frère, deux de mes "héros" musicaux : Paul Humphreys, d'Orchestral Manuvres in the Dark, et Claudia Brücken, ex-Propaganda (mais le "ex" ne sera peut-être pas éternel, nous le verrons).
Quelle gentillesse, bonne humeur et simplicité de la part de ces gens qui connurent la gloire, et pas juste le temps d'un tube, eux comme leurs deux acolytes musiciens (dont l'un, Philip Larson, fait pourtant partie des Manhattan Clique, qui bossent avec plein de géants de la musique, et pourrait donc "se la pêter" aussi) !
Bref, une interview tout sauf formelle, un véritable échange, joyeux, et ce fut appréciable, surtout pour des journalistes amateurs comme nous !
Et puis Claudia m'a dit aimer mon T-Shirt, donc pour quelqu'un qui de coutume se fout un peu de comment ils s'habille, ça marque ;-)
F, à CB : En 1987, j'étais trop jeune pour venir à Paris vous voir jouer avec Propaganda. Voyant que Claudia semble ne pas s'en souvenir :Vous n'avez pas joué à Paris ?
CB : Si, nous y avons joué, mais où ? Je ne me souviens pas où nous avions joué. ZeN [co-organisateur de l'Electro Night Live festival et leader des Waiting For Words] m'a confirmé que nous y avions joué, et de toute façon j'en suis sûre.
PH : Vous avez joué à Paris, moi aussi j'en suis sûr, j'ai lu ça quelque part.
CB : Bon, je ne m'en rappelle pas, mais je me rappelle par contre bien du concert.
PH : Aux Bains douches, peut-être ? Parce que moi j'ai joué [avec OMD] aux Bains douches au tout début des années 80 [avril 1980, pour être plus précis].
CB : Je n'en sais rien.
Claudia Brücken, Electro Night Live Festival, 20/09/2008
F : Dans quelles circonstances vous êtes-vous rencontrés ?
PH : En fait, nous nous sommes rencontrés en 1984 ou 85, à l'occasion d'un festival Greenpeace à Rotterdam, où OMD, INXS et Propaganda étaient à l'affiche.
F : J'ai un bootleg (enregistrement pirate) de ça ! [26/10/85, at Veronica]
PH : Ha, un bootleg ? (rires)
F : C'est vrai que je ne devrais pas vous le dire !
PH : Je suis au courant de l'existence de ces bootlegs.
F : Mais soyez assuré que je n'en ai jamais fait commerce !
PH, toujours riant : Non, mais il circule pas mal de bootlegs de ce concert en fait.
CB : En tout cas ce fut un grand moment, vraiment un gros concert.
PH : Oui, ce fut un excellent concert.
PH : Et donc nous nous sommes rencontrés en coulisses, mais nous n'avons pas vraiment eu le temps de parler ensemble. Et ce ne fut pas avant le milieu des années 90 que nous pûmes nous rencontrer véritablement, quand je vins au Midem à Cannes en tant que professionnel car j'étais en charge alors d'un label indépendant à Liverpool, sur lequel j'avais quelques groupes.
F : Telegraph ?
PH : Oui, Telegraph. J'avais China Crisis et quelques autres groupes de signés sur ce label. Et je venais donc au Midem pour essayer de nouer quelques affaires pour China Crisis.
PH : D'ailleurs, puisqu'on en parle, ils vont jouer avec nous, nous attaquons une tournée dans quelques semaines, et China Crisis fait nos premières parties !
CB : d'OMD.
PH : Oui, c'est OMD qui va faire la tournée [pas OneTwo].
Paul Humphreys, Electro Night Live Festival, 20/09/2008
PH : Donc j'étais au Midem à Cannes pour China Crisis, et quand vous y allez en tant que label, tout le monde sait que vous êtes là, ce qui fait qu'un type m'a appelé, que je pensais intéressé par l'un de mes groupes, mais qui en fait était intéressé par Claudia... pour signer Claudia.
F : sur Telegraph ?
PH : Non, c'était un type d'un label allemand, intéressé pour faire un album solo pour Claudia.
CB : Je voulais faire mon deuxième album solo.
PH : Alors ce type cherchait des co-auteurs intéressés pour écrire avec ses musiciens l'album de Claudia. Comme j'étais intéressé, je lui ai demandé le numéro de Claudia pour qu'on voie ensemble si ça pouvait marcher. Donc je l'ai appelé, nous nous sommes rencontrés, et nous fûmes très motivés.
CB : Oui.
PH : Et nous nous sommes mis à écrire des chansons, mais il fallut rapidement arrêter car Claudia était impliquée dans d'autres projets.
En fait, que s'est-il passé après ça ? Pour ma tournée aux Etats-Unis en 2000, j'ai demandé à Claudia si elle voulait m'accompagner en tant que chanteuse "guest".
C'est à ce moment que nous avons réellement réalisé que nous pourrions être un groupe. Car nous avons décidé d'essayer plusieurs chansons, et tout fonctionnait parfaitement à chaque fois.
CB : oui, et nous avons apprécié de constater que nous avions un très bon rapport sur scène. Andy [McCluskey, l'autre pilier et chanteur d'OMD] n'avait pas pu venir pour cette tournée, donc je me suis jointe à Paul, et en fait, cela fonctionnait très bien. Nous avons rendu justice aux chansons ; Ce que je veux dire, c'est que nous n'avons pas fait les chansons complètement comme OMD les faisaient car j'étais une chanteuse, mais c'était proche.
PH : Je connaissais Claudia depuis un moment, et comme elle n'avait pas fait de concert depuis longtemps, j'ai pensé qu'elle ne pourrait pas monter sur scène sans chanter une paire de chansons de Propaganda. Alors nous avons joué quelques titres de Propaganda, des titres d'OMD, et nous avons essayé aussi nos nouvelles compositions. Et j'ai pris conscience de ce qu'est devenu depuis OneTwo.
CB : Nous avons réalisé, après cette tournée, comment nous pourrions peut-être aller un peu plus loin ensemble. Ainsi, nous avons développé l'idée.
F : Avant votre première rencontre en 1985, aviez-vous déjà entendu vos musiques respectives ?
PH : Oui, nous savions ce que faisait l'autre, moi j'étais un grand fan de Claudia.
F, à CB : Quels sont les titres composés ou chantés par Paul que vous préférez ?
CB : J'aime vraiment des chansons comme "So in Love", un grand titre, "If you Leave", et de nombreux autres : "Messages", excellent aussi, ou encore "Souvenir". En fait, il y en a tant que j'ai du mal à choisir !
PL : "(Forever) Live & Die" ?
CB : Ce n'est pas l'un de mes favoris. Mais j'aime aussi beaucoup "Stanlow" ou "Sealand". J'adore "Electricity", qui est pour moi un titre très familier, qui me ramène à mes sources et me parle, votre premier single, c'est ça ?
PH : oui, c'était une espèce de titre punk avec des synthés, vraiment un beau mélange.
F, à PH : Et vous, Paul, inversement, quels sont les vieux titres dans lesquels Claudia chante que vous préférez ?
PH : Je me souviens avoir découvert "Dr Mabuse" à la radio, j'allais en studio avec Andy, et en entendant ça, nous tombèrent tous deux absolument sous le charme. J'ai dit à Andy "Wow, quelle voix incroyable elle a, cette fille, il faut que je trouve plus de choses sur elle" !
PL et CB, riant : C'est vrai ?
PH : C'est parfaitement vrai, Andy s'en souvient aussi.
CB : Ho, c'est tellement gentil !
F : Un titre excellent effectivement, avec un clip génial aussi !
CB : Oui, tout à fait.
F : Est-ce que le fait de remonter ensemble sur scène, quand vous avez joué aux Etats-Unis, vous a rassurés ou renforcés mutuellement... était-ce plus facile de jouer ensemble que seuls ?
PH : En fait, nous n'étions pas que deux, nous avions monté un gros groupe, il y avait six musiciens.
F, aux deux autres musiciens présents : Vous y étiez déjà ?
CB : Non, là c'était des musiciens américains.
PL : Bien plus professionnels !
PH : un grand rire
CB : Non, nous devons dire que ces quatre dernières années, nous avons vraiment amélioré notre spectacle. Aux débuts, en 2000, c'était un peu... comme une messe, vous voyez ce que je veux dire ? Mais pas dans le mauvais sens.
PH : Dans le bon sens du terme, même.
CB : Oui, car c'était comme si il y avait une idée essayant de faire fonctionner les choses. Mais depuis nous avons vécu tant de concerts que maintenant nous savons réellement ce que nous jouons et ce que nous faisons, ça fonctionne.
PH : C'est maintenant un groupe établi, depuis des années.
CB : Nous avons travaillé, travaillé, et nous nous sommes passionnés pour tout ça, ainsi aujourd'hui -vous aurez l'occasion de vous en rendre compte ce soir- c'est beaucoup plus que ce que ça a pu être à nos débuts.
PH : Oui, ce soir vous allez entendre ce que OneTwo est vraiment, quelle est la vision que nous avions de OneTwo qui prends corps juste maintenant.
F, aux deux musiciens : Pourriez-vous vous présenter ?
PH : James Watson, claviers et guitare (de Londres) et Philip Larson, claviers (de Douvre)
F : Vous n'avez pas de batteur ?
PH : Non, le batteur est un concept qui appartient au siècle passé ! (rires)
CB : Ne racontez pas ça à Mal [Malcolm Holmes, le batteur d'OMD]! (rires)
PH : Il n'aimerait pas ça. (rires)
CB : Mais toute la façon de jouer de Mal est très différente, je pense.
PH : Mal joue comme un métronome, vous savez ?
CB : C'est un véritable "électro-batteur".
PL : C'est en quelque sorte un "électronome". (nombreux rires)
F, à PL et JW : C'est facile de jouer avec Paul et Claudia ?
OneTwo : rires
HH : Vous êtes tenus de répondre que oui !
OneTwo : rires
PL et JW : Ils sont accommodants, prennent les choses tranquillement.
PH : Oui, nous avons laissé à ces gars une certaine liberté dans la façon de jouer. Et comme en concert, nous ne pouvons pas développer les chansons comme nous l'avons fait sur l'album, ces gars se chargent de le faire à leur sauce [les solos de guitare de JW notamment se démarquent des versions album].
Et j'adorerais leur confier une part du travail en studio maintenant. Je pense donc que pour le prochain album, nous tâcherons de travailler ensemble sur les nouveaux titres, avant de les enregistrer.
PL : Et il faudra jouer les nouveaux titres sur scène.
PH : Oui, avant que nous ne les enregistrions, il nous faudra faire quelques concerts. Ainsi le résultat sera meilleur.
CB : Je pense vraiment que c'est une bonne façon de travailler en fait : essayer les titres ensemble avant des les enregistrer, sortir et les jouer live, puis les peaufiner.
PH : Nous avons fait près de 60 concerts de OneTwo ces dernières années, ce qui est énorme, vous savez, et donc nous pouvons faire progresser la qualité de ces concerts en essayant de nouvelles choses.
PL : Ce soir, nous allons toutes les essayer !
PH : Oui ! (rires)
OneTwo au complet
HH : J'ai lu quelque part que le prochain album de OneTwo pourrait être plus industriel. Pouvez-vous nous en dire un peu plus ?
PH : Oui, j'aimerais qu'il sonne un petit peu plus "industriel", plus dur que le premier, avec un petit peu plus de choses qui bougent cette fois. Et je pense que l'album "Instead" était une sorte de méli-mélo d'idées que nous avions depuis de nombreuses années. Alors je pense que le nouvel album que nous allons faire sera davantage constitué "d'idées de maintenant", véritablement.
CB : Parfois, les idées (les projets ou les groupes eux-mêmes) évoluent, si vous leur laissez le temps de le faire. L'année dernière, nous avons fait beaucoup de scène ; Les chansons ont eu l'occasion d'évoluer à cette occasion.
Notre mode d'écriture des chansons a évolué de la même façon : quand Paul et moi avons commencé OneTwo, l'idée était que nous trouvions un exutoire pour la musique de chacun. Paul a amené ses chansons, j'ai amené mes chansons et nous avons écrit ensemble d'autres titres. Il s'agissait de trouver la façon de "faire sortir" notre musique, pour les autres.
PH : Mais désormais nous avons atteint un autre stade car nous savons -et honnêtement depuis peu- ce que OneTwo est réellement. Nous comprenons ce qu'est OneTwo et en conséquence nous savons ce que nous devrions faire ensuite, donc nous n'avons plus qu'à le faire ! En quelque sorte, nous avons enfin inventé le groupe.
F : Est-ce que les synthétiseurs sont toujours aussi importants pour vous qu'ils ne l'étaient dans les années 80 ?
PH : Oui, ils restent très importants. Pour moi, ils sont même cruciaux.
CB : C'est la même chose pour moi, mais j'aime aussi simplement écrire des chansons juste sur une guitare. La guitare a ses avantages. Par exemple, ça a été la panique l'autre jour dans un gros festival à Leipzig (près de 10.000 personnes) [le Wave Gotik Treffen, le 11 mai 2008] : nous avons eu une coupure totale d'électricité sur scène, et toutes les affectations de samples sur les claviers ont été perdues à cause de ça. Il a fallu plusieurs minutes pour les récupérer, et pendant ce temps, nous ne pouvions qu'utiliser la guitare. Et finalement c'était tellement beau !
HH : Quels sont vos synthétiseurs favoris ?
CB : Le Roland Jupiter 8, qui a un son très singulier, et j'adore le PPG Wave, utilisé par Michael [Mertens, le cur de la composition de Propaganda].
PH : Pour moi c'est délicat à trancher car j'adore les synthétiseurs et ils ont chacun leurs propres mérites, vraiment. Le Jupiter 8 aussi, le Korg MS-20, le Prophet 5 de Sequential Circuits (je l'ai utilisé pour faire plusieurs albums), l'Oberheim Rack. Egalement les synthétiseurs virtuels Absynth et Massive.
JW et PL : Le Moog Prodigy...
PH : Moi je ne suis pas un fan des Moog.
JW et PL : ...l'Oberheim Expander, le Roland SH-101.
PH : Ha oui zut [je traduis "soft"], je suis sponsorisé par Roland, et je dois dire aussi que j'adore absolument ce synthé ! Ainsi que le X8, une veritable création de génie !
FH : Est-ce que d'autres collaborations, comme celles de Martin Gore ou Andy McCluskey sur l'album, sont prévues ou même juste envisagées ?
PH : Nous sommes vraiment ouverts aux collaborations et nous les apprécions.
Désignant PL et JW : J'ai déjà l'intention d'impliquer ces deux gars davantage, pour l'écriture. Vous savez, nous apprécions les collaborations.
F : Claudia a fait beaucoup de collaborations, n'est-ce pas ?
CB : Oui. Je crois que ça a quelque chose à voir avec mon départ de Propaganda. Je fus totalement livrée à moi-même à cette époque. Act n'avait jamais été pensé comme un groupe ou pour durer. Cela ne fut qu'un moment dans ma carrière. Après Propaganda, en fait, j'ai toujours travaillé en collaboration, et je m'en satisfaisais, car on peut apprendre tant de choses en chemin, et on apprend à lutter contre l'adversité.
Mais je dois reconnaître que d'un autre côté j'apprécie tout particulièrement OneTwo, comme j'aime l'idée de groupe. Car on y on trouve normalement la solidarité. Propaganda était un bon groupe, auquel il manquait justement une seule chose : le sens de la solidarité. Quand je faisais mon projet solo, j'avais à me battre toute seule car j'étais responsable de tout, de toutes les décisions. Dans un groupe, vous agissez ensemble, vous n'êtes pas seule dans les hôtels, les membres s'apprécient, tout le monde sait quelle est sa place.
PH : Et chez OneTwo, il n'y a pas d'ego. Nous sommes des amis qui passent de bons moments ensemble, ce qui est bien. A la base, nous sommes tous des amis, nous avons plaisir à nous retrouver et nous nous respectons les uns les autres. Chacun apprécie la compagnie de l'autre, de jouer avec les autres ; Vous verrez plus tard, la joie que nous avons à jouer ensemble sur scène, nous adorons ça, vous savez.
F, à CB : De toute façon, rien n'empêche que vous ne soyez dans un groupe, tout en continuant à collaborer avec d'autres ?
CB : Oui, absolument.
PH : Moi je fais OMD en ce moment.
F : Oui, une grande collaboration !
PH : (rires)
Le souci avec les collaborations ponctuelles, c'est qu'elles ne sont justement, que des collaborations d'un instant, c'est leur côté négatif.
F : Connaissez-vous, et le cas échéant appréciez-vous, des artistes de la scène électro/synthpop française ou, plus largement, des artistes français ?
CB : J'adore Charlotte Gainsbourg, la fille de Serge Gainsbourg, avec son album "5.55", qui est excellent.
HH : avec Air
CB : Air, c'est fantastique également.
PH : Oui, c'est un grand groupe.
CB : Serge Gainsbourg lui-même aussi, et tout ce genre de choses anciennes. J'aime beaucoup Jacques Brel. Mais pour la scène électronique française, je ne m'avancerai pas, je ne connais pas vraiment.
PH : J'ai pu entendre quelques trucs français, vous savez, de gens qui m'envoient des liens sur mon MySpace, des chanteurs et des groupes. Mais le problème avec les Britanniques, c'est que nous sommes très insulaires, et si vous ne chantez pas en Anglais, alors vous n'intéresserez pas la presse et les charts. C‘est vraiment ennuyeux. Et donc, si un groupe français chante en Français, il n'aura aucune exposition du tout au Royaume-Uni. C'est la simple réalité, mais une terrible réalité, vraiment. Car je suis pour ma part ouvert à toutes les langues.
F, à PH : Paul, avez-vous gardé le contact avec Etienne Daho, avec qui OMD fit une version de "So in Love" pour l'émission "Les enfants du rock" en 1985 ?
PH : Je l'ai vu l'an dernier en fait, une rencontre assez amusante !
J'étais... nous étions en train de masteriser "Instead" à Londres (au Sunset Studio), je me rendais à la salle de masterisation (vous savez, la masterisation est la dernière chose que vous faites : compiler l'album en studio). J'étais donc en train de marcher dans le couloir quand je vis Etienne passer.
Je dis "Etienne !"
"Paul !" (rires)
"Que fais-tu ici ?"
Il faisait la même chose que moi : il était en train de masteriser un nouvel album.
C'est L'endroit à Londres où on masterise les disques, donc je n'étais donc pas vraiment étonné de sa présence ici, mais c'était une telle coïncidence de le croiser, je ne l'avais pas revu depuis des années, vous savez !
Il a évoqué que je puisse produire son nouvel album, mais j'étais trop occupé avec la tournée OMD. Et il ne pouvait pas m'attendre. Il voulait que je lui fasse un disque, et je lui ai répondu : "J'adorerais faire ton disque mais je pars pour une tournée de cinq mois avec OMD.". Il m'a dit "Paul, désolé, je vais le faire avec quelqu'un d'autre."
Assez marrant... (rires)
F, à CB : Une question classique : qu'en est-il d'un nouvel album de Propaganda ?
CB : Il faut reconnaître que nous n'avons pas laissé tomber l'idée de faire un autre album, car nous avions beaucoup aimé l'album "A Secret Wish", entièrement. Il signifiait beaucoup pour les gens, et pour nous.
Ainsi, nous avons essayé de faire quelque chose il y a deux ans... qui ne fonctionna pas, à nouveau [par le passé, les anciens du groupe avaient déjà essayé de le relancer, sans grand succès].
C'est juste que ça traînait trop en longueur, et donc j'ai perdu mon enthousiasme à nouveau. Car vous pouvez être excessivement anxieux de constater que ce que vous faites n'est pas aussi parfait que vous le souhaiteriez. Parfois les gens ont tellement peur de ne pas atteindre leur idéal qu'ils préfèrent s'arrêter, plutôt que de ne pas être à la hauteur.
Mais peut-être, il faut l'espérer, nous parviendrons à régler ce problème un jour. (rires)
Nous nous parlons tous les uns les autres, nous nous respectons toujours tous (Michael [Mertens] est venu nous voir jouer avec OneTwo et il aime vraiment ce que nous faisons). Donc tout le monde est en bons termes. C'est un très bon départ à nouveau.
F : ... et le nouvel album de OneTwo ?
CB : Il progresse lentement.
PH : Oui, il progresse lentement... très lentement ! (rires)
CB : James et moi travaillons sur le projet en ce moment.
JW : En progression !
PH : Nous sommes seulement en train de progresser. (rires) Mais nous en parlons tous !
CB : Nous travaillons sur des reprises, de Neil Young plus précisément. Que nous revisitons de manière électronique, très "space" et minimaliste.
PH : Oui, l'unique titre que j'ai entendu est réellement fantastique, terrible !
JW : L'unique...
PH : L'unique, oui ! (rires)
CB : Effectivement, nous en avons faite une, de reprise, qui est très belle et très bien. James et moi avons découvert en tournée que nous avons et partageons un grand amour pour Neil Young.
[James nous a fait écouter le début de la reprise sur un petit enregistreur, qui sonnait bien OneTwo, mais je ne saurais pas dire de quel titre il s'agissait.]
CB : Une direction complètement différente, pour cette grande chanson !
HH : Allez-vous jouer certains de ces nouveaux titres ou reprises ce soir ?
CB : Non.
PH : Ce soir, nous allons jouer un mélange d'"Instead" et de quelques titres de Propaganda et d'OMD.
F : ...et des titres de Act ?
CB : Nous pourrions le faire, mais ce soir le set n'est pas assez long pour nous permettre de jouer des titres de Act. [1h15]
PH : Parfois nous jouons "Absolutely Immune", ou "Snobbery & Decay".
F : Les meilleurs !
CB : Oui.
Mais il y a une autre raison si nous ne jouons pas de titres de Act ce soir : pour tous les membres de Propaganda, l'année 1986 fut bizarre, car "A Secret Wish" sortit en 1985, "Mabuse" en 1984, mais pour quelque étrange raison, en 1986 nous eûmes à aller en France tout le temps, grâce à "p;Machinery", qui était devenu un tel hit chez vous. Alors, nous venions en France, nous faisions un tas d'émissions TV, et on s'éclatait tellement ! Je tiens donc à jouer des titres de Propaganda ce soir à Paris, c'est pour moi tout spécialement, en écho aux moments très spéciaux que j'ai vécu ici.
Donc, aujourd'hui, pas de Act !
F et HH : Un grand merci pour le temps que vous nous avez consacré pour l'interview !
PH : Je pourrais parler de musique électronique pendant des jours ! (rires)
Ma chronique du concert donné le soir au Bataclan est disponible ici : ici
Merci à Stéphane Vasco pour les belles photos, prises pendant ledit concert. Au complet (celles de OneTwo mais aussi des autres artistes), elles sont visibles : là
Le site officiel de OneTwo est le suivant : www.theremusic.com
J'évoque aussi un peu le groupe mais surtout l'ensemble de la carrière de Paul Humphreys sur mon site, centré sur Orchestral Manuvres in the Dark : https://pagesperso-orange.fr/floribur/OMD/
Enfin, pour les spécialistes, mon frère (qui en fait partie) avait réalisé il y a quelques années un site très pratique de référencement des synthétiseurs (plutôt les vieux, les analogiques), dans lequel vous pourrez piocher pour retrouver les synthés cités par les membres de OneTwo :
➢ Roland Jupiter 8 : https://hhh.multimania.com/SYNTHES/NonMidi/ROLAND_JP8.htm
➢ Roland SH-101 : https://membres.lycos.fr/hhh/SYNTHES/NonMidi/ROLAND_SH101.htm
➢ Roland X8 : https://hhh.multimania.com/SYNTHES/Midi/ROLAND_X8.htm
➢ PPG Wave : https://hhh.multimania.com/SYNTHES/NonMidi/ROLAND_JP8.htm
➢ Korg MS-20 : https://membres.lycos.fr/hhh/SYNTHES/NonMidi/KORG_MS20.htm
➢ Sequential circuits Prophet 5 :
➢ Oberheim rack/expander
➢ Moog Prodigy : https://membres.lycos.fr/hhh/SYNTHES/NonMidi/MOOG_Prodigy.htm
➢ synthés virtuels Absynthe & Massive :
https://www.native-instruments.com/index.php?id=absynth4
https://www.native-instruments.com/index.php?id=massive
Interview réalisée le 16 octobre 2008 par Floribur
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OneTwo : les dernières chroniques concerts
ELECTRO NIGHT LIVE 2008 : The Commuter + Foretaste + De/Vision + Waiting for Words + OneTwo par Floribur
le Bataclan-Paris, le 20/09/2008
Voir se fermer avec une moqueuse lenteur la porte du train sous mon nez, alors que je venais d'arriver, haletant, sur le quai, aurait pu me mettre dans de très mauvaises... La suite