Interview de Jim Younger's Spirit
Je vous ai vu plusieurs fois et ce n'était pas toujours avec les mêmes musiciens... alors le Jim Younger's Spirit c'est qui au final ?
(Diego) : Au début en 2012 l'idée était de faire un duo, Polar au chant et saxo et moi à la guitare, une structure souple avec plein de trucs programmés sur un ordi. J'en avais un peu assez de la logistique classique avec en particulier la batterie. Très vite Kino est arrivé, un complément idéal qui pouvait programmer les séquences, jouer de la guitare et du clavier et faire des parties chant.
Nous avons assuré des concerts ainsi, partant en virée dans une simple voiture. En 2014 nous avons enregistré avec ce line-up l'album "Missouri woods". Puis Vincent , chanteur-guitariste, est venu nous rejoindre. On a joué au Levitation d'Angers, version française du festival psyché d'Austin. Les retours étaient bons, mais on sentait bien une légère retenue par rapport à l'absence d'une rythmique basse-batterie. Depuis un an et notre deuxième LP "Watonwan River" nous sommes dans une formule standard à cinq avec chant, deux guitares, une basse, et un batteur. La famille s'est agrandie et tout le monde semble très satisfait ainsi.
Si votre groupe est plutôt jeune en revanche vous avez pour la plupart une expérience scénique assez conséquente non ? Peux-tu me dire dans quels groupes vous avez fait vos armes (ou continuez à jouer d'ailleurs) ?
(Diego) : Un peu touche à tout j'ai joué dans des styles très différents. Le groupe le plus proche de JYS avec qui j'ai joué est The Needs un groupe Garage avec qui j'ai enregistré quatre LP et qui avait aussi un côté psyché car nous jouions sur disque et en concert des titres du 13th Floor Elevator. J'ai connu Polar en tant que saxophoniste , nous avons monté le projet Plastic Bag, un LP et le groupe a splitté. Les autres ont joué dans pas mal de formations, Vincent joue dans Splash Macadam, Kino avec les Doc Vinegar.
Kino est quelqu'un de très actif, qui a toujours plein de projets et pas que musicaux. Il fait des parodies de pochettes de disque, de couvertures de polars, et écrit un livre à sortir dans le courant de l'année. Le groupe est relativement récent, mais il y a de l'expérience...
(Polar) : ...avec énormément de concerts dans les jambes ! J'ai moins d'expérience que mes camarades, mais depuis 2006 je n'ai pas arrêté.
Avec les Quetzal Snakes, vous faites un peu figure de précurseur du retour du psyché à Marseille ... vous connaissez-vous bien ? Et comment cette musique est-elle arrivée jusqu'à vous ?
(Diego) : Oui on se connait, on a joué ensemble, et on se tuyaute régulièrement sur les bons petits groupes, que l'on fait jouer sur Marseille quand c'est possible . Les Quetzal nous ont dit s'être rencontrés à un concert des Night Beats, il n'y avait pas grand monde ce soir-là, mais nous étions aussi présents.
Le psyché n'est pas arrivé vers nous, on a pas attendu que ce soit la hype et que tout le monde devienne subitement psyché. On a toujours baigné dans le psyché et la West Coast, c'est un univers naturel. Notre musique est planante mais chargée de tension, c'est ce que l'on essaye de faire passer. Mais il est sûr que le renouveau venu d'Austin impulsé entre autre par les Black Angels a été un déclencheur et une source de motivation.
(Polar) : J'aimais beaucoup les disques du Brian Jonestown Massacre que j'ai fait découvrir à Diego, qui de son côté m'a initiée au psyché sixties. C'est vrai que le renouveau dit "néo psyché" avec sa pléthore de groupes dans des genres différents a été une délivrance pour pas mal de groupes qui en avaient un peu assez du garage-punk et souhaitaient faire une musique qui s'affranchisse plus des règles. Je pense que c'est aussi le cas pour les Quetzal, qu'on croise régulièrement à tous les bons concerts !
Peux-tu nous (re)raconter comment un groupe marseillais relativement jeune se retrouve avec un titre avec Alex Maas sur son 2ème album ?
(Diego) : L'été 2009 une amie à Paris a donné notre contact à Alex qui était en vacances par chez nous avec un de ses amis qui venait de finir ses études. On a passé quelques jours ensemble. Il nous a parlé de son festival, nous on lui a fait découvrir le Casanis (rire). En 2015 pendant l'Austin Psych Fest, un soir autour d'un barbecue texan on lui a fait écouter une démo de notre deuxième album, il a flashé sur le titre "Bloody Deeds" qui figure sur "Watonwan River" et s'est investi au-delà de nos espérances. Aujourd'hui on peut dire que c'est un ami, et nous avons ensemble des projets à venir.
(Polar) : Suite à cette première rencontre en 2009, nous sommes allés trois fois au Texas au moment de l'Austin Psych Fest, qui s'appelle désormais Levitation. Nous essayons de nous voir le plus souvent possible et sommes régulièrement en contact avec lui.C'est un homme de parole et quelqu'un de fidèle en amitié.
Qui est ce Jim Younger dont vous contez les aventures dans vos chansons ?
(Polar) :Il a fait partie du James-Younger gang, la bande de Jesse James. Mais il est moins connu que les autres membres du gang, son frère Cole Younger et les frères Frank et Jesse James. Pourtant, sa vie est passionnante. Il a participé à la guerre de Sécession côté confédéré, puis a été shérif, éleveur de bestiaux, fermier en Californie, et accessoirement bandit de grand chemin... Il fait vingt ans de prison et se suicide à peine sorti. Sa vie est marquée par cette période fondatrice des États-unis modernes et c'est un personnage complexe.
Toutes mes paroles sont inspirées de sa vie, même si je me permets quelques libertés et extrapolations... Je raconte des épisodes de sa vie, mais j'en profite aussi pour aborder des thèmes historiques ou politiques. Cependant mes paroles cherchent également à susciter des émotions et à faire marcher l'imagination de l'auditeur, ce n'est pas une dissertation d'histoire !
Portiez-vous des chemises à carreau avant de faire partie du Jim Younger's Spirit ? Est-ce obligatoire pour jouer dans votre groupe ?
(Diego) : Oui c'est absolument obligatoire, à part pour le batteur qui gesticule plus. C'est notre dress code et ça habille plus qu'un t-shirt moisi de Black Sabbath. Je porte régulièrement des chemises à carreau dans la vie normale. Mais dans le monde de JYS ça prend une connotation particulière, les westerns évidemment, mais aussi la tradition folk-rock, et plus énervé , le grunge. C'est marrant de constater que souvent les gens font attention à ça, voire ça les surprend un peu, je n'aurais pas pensé, mais c'est bien si ça ne laisse pas indifférent.
(Polar) : C'est notre côté Rio Bravo !
Que faites-vous dans la vie quand vous n'êtes pas en train de composer, enregistrer ou jouer dans le JYS ?
(Diego) : Je bosse, je dors, je lis, et je regarde beaucoup trop de trucs débiles sur FB.
(Polar) :J'enseigne l'histoire-géographie en lycée professionnel, je lis énormément et j'adore mon canapé...
Personnellement je pense que nous avons à Marseille une scène d'une richesse et d'une activité clairement sous-estimée/médiatisée ... vous qui êtes du coin, qu'en pensez-vous ?
(Diego) : Lorsque l'on parle de Marseille et ça concerne tous les domaines, on dit souvent que la ville a un gros potentiel mal exploité. Dans la musique, c'est un peu pareil. Il y a bien les rappeurs, qui eux manient bien la com' et savent s'exporter, mais bon je préfère ne pas m'étendre sur le sujet. Mais pour le reste et en particulier la scène rock il est clair qu'il y a un problème de visibilité. C'est pour partie en raison de la situation géographique, on peut dire ce que l'on veut, Marseille est loin du cur de l'activité et des faiseurs de buzz.
(Polar) : Comme tu le dis fort justement, il y a énormément de groupes de très grande qualité à Marseille et alentour, et des activistes du rock - dont tu fais partie, avec Stefan Raffi, l'équipe de Phocéa rocks, celle du Vortex, Lollipop et tous ceux qui font vivre les salles de concert, qui sont finalement assez nombreuses, ainsi qu'un vrai public qui fréquente assidûment ces lieux. Mais le public rock de la ville n'est pas extensible et effectivement, la ville est un peu à l'écart des grands axes... Même un groupe emblématique comme les Cure n'est pas passé à Marseille pour cette tournée, mais à Montpellier ! De plus, l'image de la ville à l'extérieur, c'est le métissage culturel, le rap, l'accent et les cigales... pas très rock'n'roll ! Et c'est difficile de se dépêtrer de cette image qui nous colle aux baskets.
Le disquaire Lollipop vient de fêter ses 10 ans, la Machine à coudre ses 20 ans, les Cowboys from Outerspace ont sorti un nouvel album, la Rue du Rock prépare sa 5ème édition, ... la scène rock se porte bien non ?
(Diego) : Oui la scène rock est active et diversifiée. Les groupes sont là et les lieux aussi, à condition qu'ils arrivent à survivre. La Machine à Coudre est un pilier, une légende. Lollipop est un super lieu, un vrai magasin de disques et aussi un lieu de rencontre. Punk, Métal, Pop, Garage, il y en a pour tous les goûts. Dans le domaine du psyché on est pas très nombreux, mais on peut dire aussi que le psyché est un monde musical pas cloisonné. Chacun a sa définition du psyché, donc ça peut englober plein de choses, sixties, stoner, electro... Dans JYS nous avons des influences diverses, folk-rock, cold, pop, on se définit d'ailleurs comme un groupe Dark psyché country folk.
(Polar) :En fait si on regarde bien il se passe plein de choses ici ! Il faut surtout continuer à fréquenter tous ces lieux et les faire vivre ! Je pense notamment au Molotov qui est devenu une salle importante et qui est menacé pour des raisons visiblement plus que fallacieuses... et bien sûr à Lollipop.
Votre meilleur souvenir de concert (sur scène) / (dans le public)
(Diego) : Je repense à ce bar-concert à Chalon-sur-Saône en avril dernier. C'était pour le Disquaire Day. On avait prévu en rentrant de dates en Alsace-Lorraine de faire un showcase au Gibert plus une soirée. Ça a été le top, le patron nous a payés avant même de jouer, nous a mijoté un super bon plat, on a vendu des disques et l'ambiance était de feu.
Mon meilleur souvenir dans le public ? La première fois que j'ai vu Jimmy Page et Robert Plant, c'était à Marseille au Dôme. Enfin je crois. C'est difficile comme question.
(Polar) : On a eu plein de moments très chouettes sur scène, celui dont parle Diego ou encore une soirée géniale au Barouf, au Mans, l'an dernier ! Et bien d'autres... J'adore partir en virée, c'est l'occasion de faire des rencontres, de partager quelque chose avec de parfaits inconnus, de faire partager sa musique... C'est tellement gratifiant ! Jouer à Nîmes ou à Sète, c'est la garantie de passer de bons moments avec un super public.
Dans le public, je dirai le concert des Black Angels au Levitation Austin il y a maintenant deux ans : je les ai beaucoup vus en concert, et ça a été le meilleur que j'ai vu, d'une intensité rare. Tous les morceaux étaient interprétés avec des variantes qui filaient le frisson... Mais il y en a eu plein d'autres, comme un concert magnifique du Brian Jonestown Massacre en plein air à Angoulême en 2008, ou Black Mountain à Austin en 2013... Dur de choisir...
Votre pire souvenir de concert (sur scène) / (dans le public)
(Diego) : C'est le genre de choses que l'on oublie vite, je n'ai pas de souvenir, sûrement un soir où l'ingé son ne devait pas supporter qu'une guitare soit aiguë et adorait les infra-basses.
Dans le public... heu pareil.
(Polar) : On s'éclate sur scène, quelles que soient les conditions... Alors pas de vrai mauvais souvenir. Tout comme en tant que public, il peut y avoir des déceptions, mais je n'ai pas souvenir d'un pire souvenir !
Quel est le dernier film que tu/vous as/avez vu ?
(Diego) : "La maison du diable", film en noir et blanc de 1963 et qui m'a encore fait flipper.
(Polar) : Je passe mon tour ! Ces derniers temps je vois très peu de films, je préfère lire.
Quel est le dernier livre ou BD / disque que tu/vous as/avez acheté ?
(Diego) : En disque une réédition de Todd Rudgren, et en livre "Le diable tout le temps" de Donald Ray Pollock
(Polar) : Je devrais dire "les" car je ne peux pas résister aux livres... "The Age Of Betrayal" de Jack Beatty, malheureusement non traduit en français, dont le sous-titre est "The triumph of money in America, 1865-1900". Un bouquin passionnant sur l'après-guerre de Sécession, le triomphe des barons voleurs, du capitalisme sauvage, et sur les classes populaires américaines à l'époque.
As-tu/vous quelque chose à dire que tu n'aies pas eu l'occasion de dire ?
(Diego et Polar) : On va y réfléchir et on se rappelle ! Merci en tout cas, et longue vie au rock d'ici !
Leur facebook : https://www.facebook.com/JimYoungersSpirit/
Leur bandcamp ! https://jimyoungersspirit.bandcamp.com/
Interview réalisée le 04 février 2017 par Pirlouiiiit
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