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Interview du groupe Mercury Rev à propos des albums Deserter's Songs et All is Dream

Interview du groupe Mercury Rev à propos des albums Deserter's Songs et All is Dream en concert

La Coopérative de Mai, Clermont-Ferrand Avril 2002

Interview réalisée le 10 juillet 2002 par Pierre Andrieu



Tout le monde est resté scotché par la performance de Mercury Rev à la Coopérative de Mai : une voix sidérante, des chansons magiques interprétées magistralement, des musiciens contents de jouer malgré l'affluence assez réduite, des jeux de lumière planants... Avec des concerts de cette qualité, les morceaux pop/rock psyché des Américains perchés devraient faire de plus en plus d'adeptes dans toutes les villes visitées par la tournée... Avant leur inoubliable concert, les trois membres permanents de Mercury Rev, Jonathan Donahue (guitare/chant), Jeff Mercel (batterie) et Grasshopper (guitare) ont bien voulu répondre à quelques questions...



J'ai vu en vidéo le concert que vous aviez donné aux Eurockéennes de Belfort après la sortie de Deserter's songs. Sur scène tout le groupe souriait et semblait réellement ravide jouer devant une foule aussi nombreuse et réceptive. Quel effet ça fait de se retrouver en face d'un public qui vous acclame autant ?
Jonathan : "Nous prenons beaucoup de plaisir à être sur scène à chaque fois. C'est la meilleure partie de ma journée, le reste du temps est consacré à faire des interviews... Je préfère de loin jouer nos chansons.
Grasshopper : C'est plus facile de jouer les chansons que d'en parler. Ne le prend pas comme une insulte mais c'est très dur de parler ou d'expliquer la musique qu'on fait.

Après avoir fait autant de concerts depuis la sortie en 1998 de Deserter's songs, prenez-vous encore du plaisir à jouer sur scène ?
Jonathan : On ne fait plus autant de concerts que ça. Pour Deserter's songs nous en avions fait beaucoup, mais pour la tournée consécutive à notre nouvel album, All is dream, nous tournons moins. Chaque show est donc spécial pour nous.
Jeff : Cette tournée est plus courte car nnous ne voulions plus d'une longue série de concerts où on finit complètement crevés. On aime jouer de la musique, mais à la fin d'une longue tournée, tes amis, ta famille et ta maison te manquent vraiment... Je pense que les tournées courtes sont mieux.

Vous avez fait plusieurs tournées mondiales, où préférez vous jouer ?
Jonathan : Là où nous sommes...
Grasshopper : Partout ! C'est super de pouvoir voyager autant.

Où avez-vous le plus de succès ?
Jonathan : On ne demande jamais ! On adore jouer sur scène, parfois on joue devant cinq mille personnes, d'autres fois devant 500. C'est toujours un succès de pouvoir jouer pour les gens qui viennent. Si tu ne joues qu'en fonction du gens qui se sont déplacés, tu deviens dingue. Nous adorons jouer quelque soit l'affluence : nous essayons de donner de bons concerts pour que, la fois suivante, plus de gens viennent. C'est notre premier concert à Clermont-Ferrand, il n'y a aura peut-être pas énormément de monde mais la prochaine fois, nous espérons qu'il y en aura plus !

Lors de vos concerts, jouez-vous les morceaux dans l'ordre de la set list ou tenez vous compte des réactions du public ?
Jonathan : Un peu des deux ! On a une set list mais parfois on la change en plein milieu quand ça nous semble approprié.
Grasshopper : Oui, on change de set list si un tremblement de terre survient subitement !



Est-ce que vous jouez encore des chansons de vos deux premiers albums, Yerself is steam et Boces ?
Jonathan : On joue Fritering de Yerself is steam mais on n'a rien joué de Boces depuis un certain temps.

Vos derniers disques sont très orchestrés, avez-vous rencontré des problèmes pour les retranscrire sur scène ?
Jonathan : Non, sur scène, nous avons un Mellotron et un piano ; nous n'avons pas quinze violons mais nous jouons nos chansons comme elles apparaissent sur nos disques.
Grasshopper : Mélodie, guitare, piano... Quand on a ça, on se sent comme si on était dans l'espace !

Est ce que vous rêvez de jouer sur scène avec un orchestre symphonique de 40 musiciens ?
Jonathan : Non, je ne crois que ce soit un rêve pour nous. C'est quelque chose que nous ferons peut-être mais nous ne vivons pas pour jouer avec un orchestre, on enregistre déjà avec. Ça nous suffit quand on fait le disque, sur scène nous jouons tous les six et ça nous convient parfaitement. Mais on essaiera peut-être cette formule scénique un jour...

Sur votre single The dark is rising, vous avez enregistré des reprises de Frédéric Chopin, Irving Berlin et Black Sabbath, êtes-vous réellement fans de ces trois artistes à la fois ?
Jonathan : Bien sûr ! Oui, beaucoup !
Jeff : Il y a des choses que nous écoutons tous les trois mais, par exemple, Grasshopper écoute Sun Ra, Jonathan écoute du Debussy et moi, j'écoute du Led Zeppelin. Nous avons grandi en écoutant des musiques différentes et variées...

Le début de la chanson Holes me rappelle la chanson de Pink Floyd dédiée à Syd Barrett, Shine on you crazy diamond. Etes-vous fans de Pink Floyd et de Syd Barrett ?
Jonathan : Non, pas vraiment. Mais nous aimons la chanson de Syd Barrett qui fait " I'm Trying ", c'est une chanson formidable ! Tu la connais ?

Oui ! (C'est Opel) Avez-vous écouté le très bon inédit, Bob Dylan blues, présent sur la compilation de Syd Barrett ?
Grasshopper : Non, mais j'aimerais bien l'écouter, tu peux me la graver ?



J'ai entendu des reprises de Neil Young, Cortez the killer et Philadelphia, que vous faisiez sur scène... Est-ce que vous les jouez toujours ? Etes-vous fans de Neil Young ?
Jonathan : Nous n'avons pas joué ces chansons depuis des années. Nous faisions des reprises de Neil Young, de John Lennon, de Captain Beefheart, ce soir nous allons jouer une chanson de John Cale, Keep a close Close watch. Nous sommes fans de Neil Young comme tout le monde, mais aussi de Beethoven, Black Sabbath et de John Lennon, comme n'importe qui !
Grasshopper : Nous avons tous été voir un concert de Neil Young chez nous dans les Catskills Mountains, c'était vraiment un incroyable concert !

Sur son nouvel album, Are you passionnate, Neil Young a écrit une chanson sur le 11 septembre 2001, est-ce que vous l'avez écoutée et pensez-vous que c'est une bonne idée ?
Grasshopper : Je ne l'ai pas écoutée.
Jeff : Certains personnes veulent parler de politique dans leurs chansons, d'autres pas. Nos chansons ne parlent pas de politique mais ça ne veut pas dire que nous ne intéressons pas à ce sujet. Le groupe, les disques, ce n'est pas nécessairement le lieu idéal pour parler de ça : en général, on en parle en privé.
Grasshopper : Nous allons probablement écrire une chanson sur le 3 juin... C'est le jour de l'anniversaire de ma mère !

Quand vous avez appris que Jack Nitzsche, le producteur de Neil Young et l'arrangeur de Phil Spector, voulait produire votre album, All is dream, qu'avez vous ressenti ?
Jonathan : C'était merveilleux pour nous ! Nous étions très heureux car nous aimons beaucoup son travail pour des artistes rock ou des musiques de film. Malheureusement, cela n'a pu se faire...

En 1998, quand votre album Deserter's songs a été élu " Album de l'année " par des journaux dans le monde entier, qu'avez-vous ressenti ?
Jonathan : On se sentait bien !
Grasshopper : Quand des gens reconnaissent ce que tu as fait après de longues années où tu as travaillé dur, c'est gratifiant. Nous étions très fiers de cette reconnaissance !

Ne trouvez-vous pas qu'on vous parle trop de Deserter's songs et pas assez de vos autres albums ?
Jonathan : Non, on nous parle aussi de notre dernier album, All is dream. On a fait un nouvel album mais on parle aussi de Deserter's songs, ça ne nous pose pas de problème, tout est OK pour nous !



Avant de connaître le succès, vous avez passé de longues années dans l'ombre, est-ce que c'était difficile de croire encore en la qualité de vos chansons ?
Jonathan : Non, c'est seulement difficile de maintenir l'intérêt des décideurs qui sortent notre musique. Nous aimons la musique que nous faisons mais c'est aussi un business et il faut comprendre que faire de la musique comme nous, coûte de l'argent. Derserter's songs nous a beaucoup servi : nous n'avons désormais plus besoin de pleurnicher pour avoir de l'argent pour enregistrer nos disques...

Vous sentez-vous obligés de sonner comme du Mercury Rev, de coller à un style Mercury Rev ?
Jonathan : Nos disques parlent tous de ça : faire des changements créatifs. Nos premiers enregistrements sont très différents de ce que nous faisons maintenant. Les disques que nous allons faire à partir de maintenant vont être très différents des deux derniers, sinon nous nous ennuierions beaucoup et ce n'est pas le but !

Qu'est ce que vous écoutez en ce moment et quand vous êtes chez vous ?
Grasshopper : Chez nous, on entend surtout nos copines nous pourrir la vie !
Jonathan : " Sors les poubelles ! "

C'est à ce moment-là que vous prévoyez une autre tournée, pour partir loin de chez vous?
Oui, exactement !

C'est la raison non officielle de sortir des disques ?
Jonathan : C'est ça, tu as tout compris !

Avez-vous écouté les Flaming Lips et Sparklehorse, deux groupes produits par votre ami Dave Fridmann ? Vous sentez-vous proches de leur musique ?
Jonathan : Oui, ce sont de très bons groupes. Ils sont sur différentes branches mais certainement sur le même arbre que nous.

Est-ce-que vous avez écouté la musique du groupe Sigur Ros ?
Jeff : Oui, c'est un groupe islandais. J'ai écouté ça il y a quelques temps, ils ont un son très intéressant et semblent venir d'un autre monde, comme beaucoup de groupes venant de ce pays...



Vous dites partout que vous êtes fan des Ramones, qu'avez vous ressenti quand il est mort et avez vous écouté sa reprise posthume de What a wondeful world ?
Jonatan : De la tristesse...
Grasshopper : Ça m'a rendu très triste...

Est-ce-que le fait d'habiter dans les Catskills Mountains, qui ont l'air étranges et belles, vous inspire pour votre musique ?
Jonathan : Vivre dans le monde, quelque part c'est déjà inspirant !
Grasshopper : Les Catskills Moutains sont effectivement belles et étranges amis comme on y habite et depuis très longtemps, on n'y pense plus, on est habitués ! Parfois tu conduis sur un pont sur l'Hudson et tu as ce magnifique paysage...

Est-ce-que ça vaut le coup d'œil si on va aux USA ?
Grasshopper : Oui, je crois.
Jonathan : C'est mieux que Détroit !
Grasshopper : Ça a conservé une allure du temps passé, les choses sont un peu figées.
Jeff : Beaucoup d'Anglais et d'Européens se sont installés là quand ils sont arrivés aux USA, il y a donc de vielles maisons qui donnent un côté historique au coin. Pour des Européens, ça ne semblera pas aussi marquant et vieux mais pour les USA dont l'histoire est assez récente, c'est très vieux. C'est un endroit intéressant.

Y-a-t-il une atmosphère européenne ?
Jonathan : C'est entièrement européen : au début, les Hollandais et les Huguenots français ont construit les maisons, plus tard, les Anglais... Bien sur les Indiens d'Amérique étaient là avant, mais maintenant tout est européen là-bas ! Là où nous habitons, chaque mot est généralement en hollandais ou parfois en français. Pour l'Amérique, c'est un des endroits les plus vieux que tu puisses visiter car ce n'est pas un pays très ancien...
Grasshopper : Il y a beaucoup d'Indiens là-bas, ça donne un côté étrange et surprenant à la région.



Est-ce que vous écoutez de la musique française ?
Grasshopper : On aime bien le groupe Air, Serge Gainsbourg et Vanessa Paradis, la femme de Johnny Depp...

C'est la seule raison pour laquelle elle est connue aux USA ?
Grasshoper : Oui, à peu près !

Vous sentez vous impliqués dans votre site internet, www.mercuryrev.com ?
Jonathan : Oui, oui, nous nous sentons très impliqués dans notre site officiel. Nous le consultons très souvent et nous essayons toujours de donner plus d'infos à nos fans. Cela permet aux gens chez qui nous n'avons pas joué depuis des années de comprendre quand même ce que nous faisons.

Est-il toujours possible de télécharger sur votre site des enregistrements live envoyés par des fans de Mercury Rev ?
Jeff : oui, il faut aller dans la rubrique " vibrations ", et on peut trouver des chansons enregistrées par notre public lors des concerts. Nous encourageons les gens à venir avec des enregistreurs à nos concerts pour le faire écouter à leurs amis et nous les envoyer après s'ils le veulent. C'est très bien que les gens puissent apporter une contribution à notre site.



Que pensez-vous du Mp3 et de la musique gratuite ?
Jonathan : Au début, la musique était gratuite ! Nous ne contrôlons pas ça, ce sont des avocats dans des pièces enfumées qui décident de tout. Tout ce que nous pouvons faire pour notre part, c'est jouer et enregistrer de la musique...

Pour finir, vos projets pour l'avenir ?
Jonathan : Nous allons faire des festivals en Europe cet été, dont un en France je crois...

Avez-vous commencé à écrire des chansons pour le prochain album ?
Jonathan : On a commencé à y penser !
Grasshopper : Oui, on a déjà quelques idées...

Vous attendez d'être retourné tranquillement chez vous pour vous atteler à la tâche ?
Jonathan : Oui ! On n'écrit pas trop en tournée.

Le prochain album sera-t-il produit par Dave Fridmann ?
Jonathan : Oui, il est l'un des nôtres."

Liens : mercuryrev.com, www.facebook.com/MercuryRev, twitter.com/mercuryrevvd, www.instagram.com/themercuryrev/...

Interview réalisée avec la collaboration linguistique et humoristique de Stéphane Moulin.


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