Newletter Live In Marseille 12 Février 2018
Refuge
La musique est un refuge
Jeudi 8 février au Molotov, le collectif Migrants 13 organisait une soirée de soutien aux réfugié.e.s, dans un style musical récemment apparu et appelé le RAC, Rock Against Collomb (non, pas l'explorateur, le ministre socialiste assez sinistre, qu'aucun lyonnais que je connais ne portait déjà dans son coeur, et incapable de faire une phrase - de toutes façons toujours déplaisante - sans dire 2 fois "euuuh"...). Il y avait là 4 propositions artistiques variées : la chanson engagée de Los Fralibos (avec un vrai morceau de combattant Fralib dedans), le rockcitan (mais pas que) de Sam Karpienia, la country old school du Johnny Barrel Country Band (bordélique dans l'organisation mais carré dans le son), et le DJing d'Oncle Boris (le loup blanc de la Plaine) pour faire du liant....
Pour développer un peu (et sauter une chronique de concert...) : une chanson militante altermondialiste (les pauvres se battent quand même depuis bientôt 10 ans contre Unilever pour vendre leur marque 1336, ne vous trompez pas, le thé l'Eléphant c'est celui du diable !), formation déchaînée et terminant, après un détournement virulent de Brassens, par une Bella Ciao de bon aloi ; un artiste lunaire et polymorphe et qui n'a toujours pas fini de nous surprendre (et qui a pratiquement fini par nous faire léviter au dessus de ses nappes hypnotiques, avec seulement 4 cordes à sa Gretsch) ; une bande de jeunes musiciens et -ciennes honorant le honky tonk le plus old school avec des sourires montant jusqu'au plafond (Waylon Jennings a du en ronronner de plaisir dans sa tombe) ; et le deejay le plus connu de la Plaine, au style joyeux et varié, pour faire plaisir tout en s'effaçant modestement dès qu'un des groupes avait fini de se mettre en place (mention spéciale au choix de My Boy Lollipop de Millie Small, le ska le plus attachant du monde)...
Soit 14 musicien.ne.s et quelques techniciens, venus donner gratuitement un concert dans une belle salle mise à disposition. La démarche est évidemment à saluer, d'autant qu'elle suit de près celle d'un autre collectif à la Machine à Coudre, un peu avant Noël dernier. Belle surprise, la salle était pleine à craquer - 300 personnes à prix libre, on peut espérer que cela a réuni un joli petit pactole dans la boîte à chaussure qui nous accueillait à la caisse ! Par ailleurs la salle était notoirement plus jeune que, par exemple, 4 jours plus tôt pour le passage du presque habituel Legendary Tigerman qui avait, lui, attiré le public rock qui, de nos jours, est largement trentenaire. De quoi se rassurer sur le public étudiant de Marseille, qui est manifestement encore connecté au monde autrement que par son smartphone... Et évidemment un public de militant.e.s chevronné.e.s et un peu plus gris du cheveux, celles et ceux que j'imagine se démener au quotidien pour rendre la vie moins dure aux jeunes voyageurs.
Autre élément assez rare dans un concert orienté rock, du coup : la présence d'un public multicolore, et de pas mal de jeunes gens ayant manifestement fait le voyage depuis la terre d'Afrique - et peut-être bien d'autre gens venus d'Orient aussi... Peu importe qu'ils soient migrants (c'est-à-dire, littéralement en route pour ailleurs), ou réfugiés (c'est-à-dire, arrivés là où ils voulaient aller), ils ont posé leur sac et leurs emmerdes le temps d'une soirée pour écouter et voir quatre styles de musiques occidentales - je ne parierais pas que tous avaient déjà vu ça auparavant, et j'imagine avec plaisir le dépaysement artistique que cela a pu provoquer dans leur tête... Alors bien sûr, ce concert n'a pas changé le monde, et particulièrement pas le leur. Il n'empêche que c'était une belle bulle de chaleur ouverte à tout le monde. La musique qui sert de refuge, ça n'arrête pas le froid, les sinistres paperasses, les files d'attente incertaines, l'angoisse...
Mais si ça peut vous donner une pause, rallumer un petit quelque chose, si une salle pleine de gens qui sont venus pour vous aider un tout petit peu, à leur façon, peut donner un début d'espérance en des jours meilleurs et en une vie possible en Europe, ça n'est quand même pas rien !
Pour en savoir plus sur le collectif :
Collectif Migrants 13 / El Manba, 8 rue Barbaroux, 13001 Marseille
MANBA Never Going Back - 8, rue Barbaroux - 13001 - Marseille
https://www.facebook.com/collectifmigrants13/
PS : pour finir, je voudrais vous conseiller un ouvrage sur la migration, une sorte de bande dessinée sans texte, au dessin et à l'inventivité éblouissante, déjà ancienne mais récemment rééditée... Là où vont nos Pères, de Shaun Tan. Vous y découvrirez ce que chacun emporte loin de chez lui, et ce que chacun apporte quand il arrive quelque part. C'est très probablement la chose la plus bouleversante et la plus intelligente que vous pourrez trouver sur le sujet. Rien que de repenser à certaines cases, j'en ai la chair de poule...
Philippe
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Le livre de la semaine
Ci dessous (avec sa permission) le dernier de cette série, le #365 Jacquot ne savait plus. Il avait passé un an à ecrire texte sur texte, mais aucun ne l'avait satisfait. Il avait voulu faire un monument de littérature, il se retrouvait au final avec des centaines de petits moais qui envahissaient les pièces de sa maison, et le regardaient d'un air grave. "Tout ça pour ça" semblaient-ils dire.
Alors qu'il vidait le contenu de sa dernière bouteille dans l'évier, un souvenir d'enfance revint à sa memoire. Il devait avoir dix ans. On lui avait proposé de tenir un stand dans un vide-grenier, et lui, plutot que de vendre ses vieux jouets, avait eu une brillante idée. Il prit des boites à chaussures, dessina des jeux de l'oie à l'intérieur, et ainsi armé de son concept révolutionnaire, fixa le prix à cent francs pièce. Pas besoin d'être une lumière pour deviner que le four fut complet. Personne ne compris le délire, aucune boitée fut vendue.
Aujourd'hui, il avait l'impression d'avoir fabriqué trois cent soixante cinq boîtes à chaussures. Trois cent soixante cinq trucs, que toutes les explications du monde ne parviendraient pas à justifier. Il était fatigué de la défonce, des muses trop belles et des cons trop con. Dans son bureau, il enflamma une feuille, la jeta dans le tas de papiers. L'incendie prit aussitôt, colorant sa figure d'un rouge d'enfer. Il se divertit quelques minutes de la danse lascive des flammes, puis alla dans sa chambre. Il s'allongea dans son lit, puis ferma les yeux.
Les disques d'aqui